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Citations sur Dossier de l'art - HS, n°20 : Le romantisme noir de G.. (6)

À la même période, le sculpteur Jean Carriès, avec ses techniques de céramiste très originales (il découvrit et adopta le grès de 1878), exécuta quant à lui un bestiaire halluciné, en vue de la commande d'une porte monumentale passée par une riche Américaine, héritière des machines à coudre Singer. Il mourut à la tâche en 1894 mais les vestiges de cette œuvre, comme Le Grenouillard (vers 1891), témoignent là encore de ce tropisme médiéval (il y avait par ailleurs une citation explicite d'un chapiteau roman dans son projet) hanté par le grotesque, les grimaces, l'infâmant. L'émaillage, dit Amélie Simier, "couvre les personnages d'efflorescences pustuleuses proches des représentations de symptômes de maladies vénériennes", de sorte que "l’imagier" Carriès - il se concevait comme tel - produit "un peuple mutant, fantomatique et comme contaminé par un mal mystérieux".

Démons et merveilles
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L'une des raisons pour lesquelles le romantisme noir n'a pas encore été identifié en histoire de l'art tient au fait que ces œuvres ont été longtemps méprisées. Quel sens cela a-t-il de peindre des squelettes, des fantômes ou des sorcières en 1900, à quelques années des révolutions fauve ou cubiste ? L'approche d'une histoire de l'art en perpétuel progrès a banni cet art nourri de références anciennes, de superstitions, de contes, de mythes...

Un long et sombre fleuve souterrain
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La corruption de la beauté est telle que son expression transite également par le recours à ce qui est ouvertement disgracieux, repoussant, voire révulsant. La résurgence de figures archaïques s’apparente à une sorte de grand retour du refoulé. La part d'irrationalité que le positivisme et le progressisme de la société industrielle ont cherché a évacuer se fraie une place de prime importance grâce à des archétypes des peurs populaires : la sorcellerie et ses avatars ; la mort se mêlant aux vivants (les fameuses danses macabres). Les peintre symbolistes affectionnent les atmosphères de cauchemars nourris de folklore ancestral, les peurs primaires des contes. Pau Ranson, féru d’ésotérisme, lecteur des Grands initiés d'Édouard Schuré (livre de référence sur les mystères des religions), signe ainsi des œuvres aux accents démoniaques. Ses vision nocturnes sont d'autant plus déconcertantes qu’elles sont traitées dans une veine japonisante : c'est le cas des Sorcières autour du feu, et surtout de sa Sorcière au chat noir de 1893.Ce tableaux extraordinaire, chef-d’œuvre de synthétisme, laisse apparaître dans un jeu visuel d'une remarquable complexité une fidèle des sabbats recroquevillée dans une posture mélancolique tandis que gravitent autour d'elle, outre un félin au dos bombé typiquement nabi, des formes vagues, comme celles qui se construisent et se déconstruisent dans es clairs-obscurs ou les volutes de fumée.

Démons et merveilles
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Quant aux descriptions symbolistes d’environnements géographiques ou de cadres domestiques, elles peuvent jouer sur deux registres presque opposés : les paysages nocturnes et tortueux, d'une part ; l’inquiétante étrangeté du quotidien, de l'autre. Le curseur de l'émotion va ainsi du terrifiant à l'anxiogène. Le terrifiant, c'est Mucha figurant entre les parois serrées d'un gouffre, dans un décor étouffant et crépusculaire, l'attente sans fin de deux figures squelettiques ; ce sont encore les forêts ombreuses, les monuments gothiques et les montagnes escarpées gravées par Gaston Redon, le frère cadet d'Odilon. L'anxiogène se niche dans des éléments beaucoup plus familiers : des architectures ou des aménagements urbains qui n'ont pas subi de métamorphoses par exemple, mais dont la présence en soi constitue une sorte d'intrusion discrète, troublante, du fantastique : La Maison rose et Nocturne au parc royal de Bruxelles par William Degouve de Nuncques ; Un Parc la nuit par Jozsef Rippl-Ronai ; À Bruges, un portail par Fernand Khnopff ; Digue la nuit et Clair de lune et lumières par Léon Spilliaert. Ces lieux, par l'agencement de leur perspective, leurs lumières, la silhouette des éléments qui les construisent, sont comme chargés d'influx fantomatiques.

Démons et merveilles
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"Le cauchemar" de Füssli valut à son auteur une gloire immédiate et sulfureuse lors de son exposition en 1782, de telle sorte que plusieurs versions postérieures virent le jour. Il est difficile aujourd'hui de comprendre l'émoi qui saisit les spectateurs devant le tableau. Füssli y abordait, de manière à peine voilée et surtout déviante, la question de la sexualité féminine : dans les vieux contes germaniques, chevaux et sorcières rendaient visite, la nuit, aux femmes sensées entretenir des relations sexuelles avec le diable.
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Amateurs de romans noirs de la fin du XVIIIème siècle et familiers de l'oeuvre de Goya ou Friedrich, les surréalistes cultivaient le même goût qu'eux pour tout ce qui échappe au contrôle de la raison. L'inconscient et ses mystères, toujours en voie d'exploration par Freud, furent une source d'inspiration majeure pour ces artistes désireux de laisser libre cours dans leurs créations, à une pensée et à des automatismes débarrassés de références morales ou esthétiques.
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