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Critique de sandrine57


Ils sont nombreux, en ce jour glacial de février 1945, à se presser sur les bancs de l'église Saint-Pierre-de-Chaillot pour assister à la messe d'enterrement de la duchesse Natalie de Sorrente, née princesse de Lusignan. Officiellement, cette femme encore jeune est morte d'une embolie pulmonaire. La vérité est pourtant toute autre. Natalie de Sorrente est morte dévorée par la morphine, rongée par un secret de famille. Un secret de famille embarrassant mais si banal qu'autour d'elle on l'a balayé d'un désinvolte : ''ce sont des choses qui arrivent''. Mais pour cette princesse si fière de son ascendance, le secret s'est insinué comme un poison, balayant ses convictions les plus profondes, l'interrogeant sur ses origines à un moment de l'Histoire où l'occupant nazi en a fait une question de vie ou de mort.


C'est à Cannes et dans ses alentours que l'aristocratie parisienne trouve refuge pendant l'Occupation. Ils ne fuient pas les persécutions allemandes, ils n'ont rien à se reprocher, leur particule les met à l'abri d'une quelconque ascendance juive et ils apprécient tout ce que fait Pétain pour la France. Non ils essaient d'échapper à un Pris qui s'enlise dans l'ennui et les restrictions. Sur la Côte d'Azur, le soleil brille, les dîners sont charmants et le bruit des bottes reste lointain. L'aristocratie est pétainiste, frivole, cynique, et peut se faire antisémite si l'air du temps l'exige. Dans ce monde qui l'a vu naître et où elle évolue comme un poisson dans l'eau, Natalie de Sorrente se targue d'être anti-conformiste, même si elle participe à l'insouciance générale. Même la découverte de sa filiation ne la fait pas dévier de sa trajectoire pailletée. Bien sûr, elle va laisser le doute s'insinuer en elle, s'interroger sur le sort des juifs mais n'ira pas jusqu'à trouver le courage de se démarquer de la complaisance teintée de lâcheté de son milieu. Elle mourra d'avoir fermé les yeux, de s'être tue.
Un livre dérangeant dont le titre aux notes résignées décrit toute la passivité de l'aristocratie française à l'heure des choix. Eux ferment les yeux et essaient de maintenir leur train de vie. Dans ce monde où il faut avoir du sang bleu pour exister, les juifs ne sont pas dignes qu'on s'intéresse à leur existence ou à leur mort.
Les petites histoires de ces mondains se mêlent à la grande Histoire sans réellement s'y frotter. Tandis qu'on danse dans les salons parisiens, qu'on fréquente les plus grandes tables du marché noir, ailleurs des hommes, des femmes, des enfants, portent une étoile jaune... Ils se vantent du passé glorieux de leurs ancêtres mais ils n'ont rien de glorieux ces aristocrates qui pactisent avec l'ennemi.
Un beau roman qui décrit la guerre sous un angle original, même si l'empathie est difficile avec ces êtres frivoles et lâches.
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