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Critique de argali


Dans sa course à l'éditeur, un narrateur s'essouffle. Malgré la foi en son oeuvre, il se résigne à ne la voir point publiée. Sur cette courbe déclinante, que viennent rebrousser localement des résistances, où viennent se poser des rencontres de bon conseil, se reposer des amitiés anciennes et bien ancrées, l'ambition littéraire elle-même semble se tarir. Toute proportion gardée, le parcours apparent serait donc à rebours de celui du narrateur proustien : écriture abandonnée, sereine résignation à la vie, en quoi, là encore, narrateur n'est pas auteur ? du moins, pas celui de cette fiction écrite dans une langue très tendue, vivante et jubilatoire, « virtuose » me reprochait un éditeur, faisant jouer la polysémie et les résonances, et où un humour grave point en mains détours.

Mon avis :

Ce résumé rédigé par l'auteur donne le ton de ce livre.
Un narrateur dont on ne sait vraiment s'il est un génie proustien incompris ou un snob imbu de lui-même, voit les refus de son manuscrit croître inexorablement. Son rêve de reconnaissance s'étiole puis s'éteint. Portant un jugement acerbe et pédant sur la vacuité de ses semblables et la banalité mesquine des choses du quotidien, il finit malgré tout par se résoudre à entrer dans le rang. Il accepte un travail rébarbatif mais croit-il roboratif afin de passer à autre chose, tout en nourrissant sa faim d'écrire. Ce n'était que mirager.
Las, il se retirera en Bretagne.

Vous l'aurez compris, le style fait l'essentiel de ce roman. le thème est classique : la douleur d'écrire, de ne pas être reconnu, le sentiment d'impuissance face à des éditeurs tellement débordés par des manuscrits médiocres qu'ils ne voient même plus scintiller une perle dans la pile à lire ou encore l'incompréhension de l'entourage - des béotiens pétris d'impéritie…
Ce qui fait l'intérêt de ce roman est donc le style léché où subjonctif imparfait et vocabulaire rigoureux voire suranné rivalisent. Les exigences stylistiques de l'auteur sont manifestes : pas d'expressions obvies, de formules convenues, rien n'est laissé au hasard. Au point de nous livrer un texte très (trop) travaillé.
J'avoue avoir trouvé le début pédant et m'être forcée un peu à dépasser les cinq premières pages où le narrateur se montre d'une insupportable suffisance. Mais plutôt que de m'en offenser, j'ai pris le parti d'y goûter sans arrière pensée et j'ai fini par trouver le texte jubilatoire.
Je ne lirais pas ce genre de roman à satiété : il faut retenue garder pour mieux jouir des plaisirs ; mais à l'occasion, cela se savoure telle une madeleine.
Hélas, je crains que ce roman ne devienne jamais best-seller. La construction grammaticale de l'oeuvre et son style d'outre-siècle ne séduiront pas les foules. Mais cela n'est certes pas l'ambition de l'auteur chez qui je reconnais un vrai travail de linguiste érudit.
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