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Critique de colimasson


Acte de naissance du mouvement de la Pléiade et témoin de l'idéologie humaniste, le livre de la Défense et illustration de la langue française est aussi un acte politique d'unification du royaume français.


Ses fondements sont ceux de l'humanisme et expriment un fidèle attachement aux sources antiques grecques et latines du savoir. Joachim du Bellay recommande l'étude et l'imitation de ses meilleurs auteurs mais limite cet apprentissage dans le temps de formation du nouveau poète. La littérature antique ne doit plus être considérée comme fin mais comme moyen. On peut s'en nourrir mais il faudra ensuite lui faire connaître le processus alchimique de transsubstantiation. Parvenu au point d'innutrition des sources antiques, celui que nous ne pouvions jusqu'alors pas encore appeler un poète aura fait siennes ses références et elles seront si bien assimilées qu'elles se mettront à s'exprimer en lui avec leur langage propre ; le poète pourra alors prendre la plume et s'atteler au travail créatif. Cessant d'être asservi au passé, le poète pourra construire la littérature moderne.


Pour guider son nouveau poète, Joachim du Bellay se livre à une critique de la littérature de son époque, qu'il juge inconsistante et sans caractère, et préconise, à l'aune de la Pléiade, la création poétique avivée de néologismes et de nouveaux tours littéraires. Mais surtout, il recommande l'abandon du latin au profit de la langue vulgaire, c'est-à-dire du français.


A l'époque de la publication de son livre, le latin était encore la langue de référence de l'élite mais son utilisation commençait déjà à être contestée dans d'autres pays et surtout en Italie, avec Pietro Bembo et Sperone Speroni. Privilégier l'utilisation du français conduisait alors à s'inscrire dans la continuité de ce mouvement et à renforcer l'unité nationale française particulièrement menacée dans l'affrontement entre le roi François Ier et Charles Quint. Joachim du Bellay juge sans doute également que la cohésion sociale et culturelle se fera dans l'adoption d'une langue commune et le français, entre le latin et les patois foisonnants, pourrait susciter l'unanimité.


On lira ce court texte comme une curiosité performative à la fois au niveau littéraire, pour le renouvellement poétique affranchi de ses références antiques, mais aussi au niveau politique, pour l'affermissement de la cohésion nationale par l'utilisation généralisée et légitimée d'une langue commune accessible au clerc comme au peuple.
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