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Critique de Cancie


Alors qu'il est confiné chez lui, devant la mer, sur la côte bretonne, Marc Dugain se souvient de son père décédé trente-six ans plus tôt de multiples tumeurs malignes, de ses derniers instants et de sa souffrance dont il ne voulait rien montrer. Il entreprend de retracer le destin de cet homme qu'il n'a vraiment connu, compris et aimé que peu de temps avant de le perdre, au moment où il allait pouvoir profiter pleinement de lui et de son estime. Il n'a entretenu avec lui une extrême proximité que les dernières années, ayant été un adolescent rebelle convaincu de ne jamais pouvoir arriver à la hauteur de la vertu paternelle.
Il en a fallu de la volonté, titre de l'ouvrage, à ce père, ce petit breton aux origines sociales modestes. Cet aîné de trois enfants vivant la plupart du temps seuls avec leur mère Marguerite, leur père dit « le Bosco », longuement absent car matelot embarqué sur de gros navires, cet adolescent dont les rêves et les ambitions étaient en mer va devoir surmonter la terrible épreuve de la poliomyélite, en pleine occupation allemande. Paralysé des deux jambes et condamné à être immobile, s'il a dû abandonner l'espoir de devenir officier de marine, à force d'efforts, de nombreuses opérations et l'aide inestimable d'un médecin qui a à coeur de lui rendre « les jambes qui vont avec ses capacités intellectuelles », il parvient à retrouver l'usage de sa jambe droite, à remarcher, et grâce à l'enseignement public il devient ingénieur spécialisé en physique nucléaire et en chimie des sols.
Il se marie, et le couple part vivre en Nouvelle-Calédonie puis au Sénégal où l'auteur naîtra en 1957, avant de revenir à Paris. Plus ouvertement féministe que son épouse, il déconcerte même parfois ses contemporains.
À travers la vie de son père, c'est l'Histoire de la France et même du monde que Marc Dugain nous offre, de la Première Guerre mondiale jusqu'à la fin des colonies.
Ce sont les pensées de son père, certes, que l'auteur dévoile, mais à la lecture de ses précédents romans, il me semble que ce sont sans doute aussi les siennes, des pensées en tout cas, remplies d'un profond humanisme.
J'ai particulièrement été sensible à cette analyse politique de la période de la décolonisation où il faut abandonner les richesses minières des pays colonisés dont on aurait tant besoin, au moment où l'on entre dans une ère de production et de consommation massives, ce qui explique la réticence de certains politiques ! La manière dont les colons ont piétiné ce qui avait été élaboré depuis des siècles n'est pas oubliée.
La guerre froide est également largement évoquée, tout comme la liquidation de Kennedy.
Ce roman montre avec beaucoup de pudeur la difficulté à s'affranchir de ses parents, comment est-ce qu'on peut trouver sa place de fils tout en s'émancipant de ses parents et Marc Dugain exprime finement comment il s'est épuisé toute son adolescence à résister à ce père si incroyable, si exemplaire et sa difficulté de trouver sa place de fils à ses côtés.
C'est un roman autobiographique magnifique, riche, très fort, un roman humaniste qui couvre toute une époque, entremêlant petite et grande histoire et qui aborde par petites touches de nombreux sujets de sociétés outre la politique et ses compromissions.
Mais c'est avant tout un roman dont le thème central est l'amour, roman qui nous permet de comprendre aussi comment Marc Dugain est devenu Marc Dugain

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