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Critique de coincescheznous


Voilà un monument ! le Comte de Monte-Cristo s'apparente dans la représentation collective aux Misérables de Victor Hugo : une oeuvre fleuve incontournable du XIXe siècle entrée dans l'imaginaire national. L'histoire d'Edmond Dantès, condamné à tort, qui revient se venger de ceux qui ont brisé sa vie, est ainsi l'un des grands mythes de la littérature populaire française.

Reste que si le récit de Dumas a été adapté sous de multiples formes et plagié des centaines de fois, le roman-feuilleton originel de plus de 1 600 pages peut effrayer par son ampleur. Cela serait une erreur car ce monstre livresque est d'une passionnante richesse et propose des heures jouissives de lecture.

Paru sous la forme de feuilleton entre 1844 et 1846, il est inspiré de l'histoire vraie d'un cordonnier injustement accusé d'être un espion pour le compte des Anglais. Dumas va reprendre ce fait et le transcender pour créer son mythe.

Je me contenterai ici d'un passage en revue du 1er tome qui sera suivi d'un second billet sur la suite de cet imposant chef-d'oeuvre.

Dans la première partie, Dumas utilise une toile de fond historique pour construire son intrigue : la Restauration et le spectre du retour de Napoléon exilé à l'Île d'Elbe. Une époque confuse, propice à l'arbitraire et au déni de justice, qui permettra aux ennemis de Dantès de l'accuser d'être un conspirateur à la solde de l'Empereur déchu et de le faire emprisonner sans autre forme de procès dans le terrible château d'If.

Le roman débute ainsi par une intrigue politique qui navigue avec brio des faubourgs et des docks de Marseille aux lustres feutrés des salons du roi Louis XVIII aux Tuileries. La petite histoire (le destin tragique d'Edmond Dantès, jeune homme au coeur pur et à l'avenir brillant) et la Grande se mêlent (les 100 jours de Napoléon) dans un récit qui va à toute vitesse et est peuplé de personnages iconiques comme l'ivrogne Caderousse, l'envieux et calculateur Danglars, le torturé et ambitieux Gérard de Villefort ou le bon et pur Maximilien Morrel. La construction est savamment orchestrée et les jeux de pouvoirs et de jalousie s'enchaînent dans une terrible mécanique pour la mise à mort d'Edmond Dantès.

S'ensuit le plus grand morceau de bravoure de ce premier tome, l'emprisonnement au Château d'If et la rencontre avec l'Abbé Faria. du récit politico-historique, le roman devient alors un pur récit d'aventures. Il est à couper de souffle, tant il est chargé de tension et d'émotion. Ces pages sont d'ailleurs à ce point fortes qu'aujourd'hui le château d'If propose de visiter les geôles de Dantès et de l'Abbé Faria, deux personnages de fiction qui ont tant marqué la réalité qu'ils s'y sont fait une place !

Le réalisme du début du roman laisse place au conte merveilleux et Dantès devient le Comte de Monte-Cristo : une sorte de super-héros vengeur, sombre et inquiétant. le roman joue ici avec la mode de l'orientalisme en vogue à l'époque et l'on bascule dans l'exotisme et la fantaisie purs. Dumas se permet même de flirter avec la frontière du fantastique, notamment dans un trip halluciné après l'absorption de confiture de haschich.

Une troisième partie, moins enlevée à mes yeux, se situe à Rome et sert de prémices à la vengeance de Monte-Cristo, avant son arrivée à Paris pour terrasser ses ennemis.

J'ai dévoré les six cents premières pages de ce roman-fleuve ébouriffant. Ainsi, même en connaissant les tenants et aboutissants du récit, j'ai été totalement pris par le rythme haletant de l'ouvrage et par son génie pour manier les genres, pour monter des histoires et pour construire des personnages hauts en couleurs. La magie de la chose est que le texte, bien que complexe et épais, reste un objet purement ludique et populaire, peuplé de figures et d'aventures saisissantes.

Un mot sur la langue, superbe, de Dumas. À la fois précise et simple, elle est un régal. Les dialogues – nombreux – sont d'une incroyable efficacité et le style, sans jamais être pompeux, est capable de belles envolées notamment grâce à des métaphores magnifiquement imagées.

En un mot, voilà un chef-d'oeuvre qui mérite amplement sa réputation.



Tom la Patate
Lien : http://coincescheznous.unblo..
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