En cette année 1967, il y eut apparemment beaucoup d'expos, aux Champs-Elysées, au Cercle de la rue de Choiseul, Ingres au Palais des
Beaux Arts, expositions particulières de Courbet et Manet et l'exposition universelle au Champ-de-Mars, qui
« ont mis cette année, sous les yeux du public toute une série d'oeuvres des peintres français, qui permet de porter sur eux un jugement d'ensemble et de les caractériser dans leurs traits principaux. de là, la nature du travail que j'entreprends et le titre que je lui donne. »
Tel est le propos de
Théodore Duret dans ce livre.
Mais qui était ce
Théodore Duret (1838-1927) ? Peu de gens s'en souviennent, à tel point qu'il n'apparaît pas dans notre Petit Larousse, rien de rien entre : Düren, ville d'Allemagne et
Albrecht Dürer… Et pourtant, collectionneur et marchand d'art précédant Paul Durand-Ruel et
Ambroise Vollard (qui eux ont les honneurs du dico) il a défriché le métier, soutenu bec et ongle les impressionnistes auxquels il a révélé le Japon (et inversement d'ailleurs), après sa propre découverte d'Hokusai
Peu se souviendront aussi qu'il fut un ardent défenseur de son ami
Zola pendant l'affaire Dreyfus qu'il rejoignit même à Londres pendant son exil en témoignage d'amitié.
Mais sa biographie n'est pas l'objet de ce livre qui est, comme il le dit clairement dans son avant propos, de faire en quelque sorte le point sur la qualité des oeuvres présentées aux différentes manifestations de 1967.
Son fil conducteur, sa pensée profonde, est que « les manifestations de l'art n'ont de valeur qu'autant qu'elles sont originales et spontanées, les oeuvres d'une école puisant tout en elle-même auront toujours un mérite supérieur à celles d'artistes qui, ne vivant que de souvenirs et de traditions, sont, par cela même, condamnés à ne produire que des pastiches ou des oeuvres de reflet.
Ainsi, il examine tour a tour, Ingres, qu'il met en parallèle à Raphaël,
Michel-Ange et Léonard, puis les Naturalistes, parmi lesquels il cite et étudie Corot, Rousseau, Millet, Troyon et Fromentin, le groupe des peintres de genres, Meissonier et Gérôme pour les deux principaux. Ensuite il consacre un chapitre successivement à Courbet et à Manet qui furent du compte de ses amis proches, il n'en passe pas moins pour autant leurs qualités et défauts au peigne fin en toute simplicité.
Pour terminer un chapitre sur « L'art bourgeois » et « l'art officiel » tous deux fort intéressants, prémonitoire pour le premier, toujours tristement actuel pour le second.
Je me suis régalée à cette lecture, enrichissante autant que parfois drôle car le personnage aux accents quelque peu péremptoires il faut dire, n'est pas sans humour .