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Critique de allezvousfairelire


[Chronique rédigée en mars 2015, quelques jours après la sortie]

Aaaaattention les yeux… voici le plus mauvais livre de l'année !

Je ne suis pas du genre à m'esquinter la santé à lire des trucs nullissimes jusqu'au bout, et encore moins à venir cracher mon venin sur la toile après, non, vraiment, il y a trop de bons livres qui m'attendent et je ne vois pas l'intérêt d'ajouter mon poison à celui des trolls qui le déversent déjà à foison — MAIS !

Mais The Book of Ivy récolte depuis sa sortie il y a un mois toutes les louanges possibles et imaginables sur les blogs et les plateformes de critiques (voir les pages Babelio, Booknode, Goodreads…), ce qui me rappelle un peu le phénomène Twilight, qui n'a commencé à se faire basher qu'à partir du moment où, le tsunami aidant, d'autres personnes que des midinettes de 14 ans se sont mises à le lire. Or, de voix discordante sur The Book of Ivy, pour l'instant, je n'en trouve pas. Alors me voilà.

Acheté à l'inauguration du salon du livre après avoir lu les 30 premières pages sur place et donc sachant déjà que c'était consternant — faut-il que j'aime me faire du mal — ce livre n'a eu de cesse d'aggraver son cas. Mais pourquoi je l'ai acheté, ce machin écrit avec les pieds ? D'abord parce que la couverture, très efficace, couplée avec le pitch, semblent crier « KICKASS ! ». Ensuite, une curiosité morbide m'a poussée à vouloir vérifier que le résumé et les premières pages se réalisaient effectivement. Car voyez-vous, c'est le problème numéro 1 de ce livre : dès la quatrième de couverture, on sait tout ce qu'il va se passer. Je vous la copie-colle :

"Voilà cinquante ans qu'une guerre nucléaire a décimé la population mondiale. (…) des deux familles qui se sont affrontées pour obtenir le pouvoir, la mienne a perdu. Aujourd'hui, les fils et les filles des adversaires d'autrefois sont contraints de s'épouser, chaque année, lors d'une cérémonie censée assurer l'unité du peuple.
J'ai seize ans cette année, et mon tour est venu.
Je m'appelle Ivy Westfall, et je n'ai qu'une seule et unique mission dans la vie : tuer le garçon qu'on me destine, Bishop, le fils du président. Depuis ma plus tendre enfance, je me prépare pour ce moment. Peu importent mes sentiments, mes désirs, mes doutes. Les espoirs de toute une communauté reposent sur moi. le temps de la rébellion approche…
Bishop doit mourir. Et je serai celle qui le tuera.

Née pour trahir et faite pour tuer… Sera-t-elle à la hauteur ? À la fois histoire d'amour torturée (CORRECTION : gnangnan), thriller psychologique (CORRECTION : ramassis de cliché) et dystopie cruelle, The Book of Ivy vous entraîne dans un compte à rebours haletant (CORRECTION : une course de limace) dont vous ne sortirez pas indemnes (NB : ça malheureusement c'est vrai)."

On sait donc avant d'ouvrir, le bouquin, que l'histoire d'Ivy se déroule ainsi :

1. (Dystopie confuse qui sert de prétexte au mariage forcé)
2. Je dois épouser ce garçon et je dois en profiter pour le tuer car c'est ma mission.
3. (Un beau gosse sauvage apparaît !)
4. Oh mais zut, alors je suis tombée amoureuse !
5. (Angoisse et pommes de terre bouillies)
6. En fait, je vais pas le tuer.
7. (Fin)

Lorsque l'on connaît d'avance le scénario, la narration ne peut nous surprendre que de certaines manières :
-Une superbe langue (nope)
-Une bonne traduction (nope nope)
-Des personnages ayant une véritable profondeur (nope nope nope)
-Des péripéties originales (lol)
-Un rythme haletant (XD)
-Un fond éthique fort sur le mariage forcé, la place de la femme, la vision des sexes (WARNING ! Ce roman craint.)

Reprenons point par point :

*Une superbe langue (nope)
C'est fade comme du pain sans sel, et léger comme du kouign amane. Je ne vais pas développer, vous avez tous lu de la mauvaise littérature.

*Une bonne traduction (nope nope)
Je pouvais constamment lire l'anglais en transparence du français, ce qui est (très) mauvais signe. Je vous offre un exemple. Un seul, parce que je ne cherche pas à vous faire mal, non plus :

V.O. : -You… you like him ?
V.F. : -Tu… tu l'aimes bien ?

Tu l'aimes bien ? Non mais sérieusement ? C'est une erreur d'anglais niveau 4ème, que peut-on dire d'autre à ce stade ? Elle parle pas de son plaid en peau de mouton, auquel cas je comprendrais qu'on lui demande s'il elle l'aime bien, c'est doudoux moi aussi j'aime bien, non elle lui parle du mec qui lui met des papillons dans le ventre lorsqu'elle croise son regard de braise, cas dans lequel tout français normalement constitué demanderait : « -Il… il te plaît ? » C'est vraiment pas compliqué.

*Des personnages ayant une véritable profondeur (nope nope nope)
-Bishop est parfait. C'est tout. Il est juste parfait. Il est beau, il est bronzé, il est musclé, il a un sourire éclatant, il est doux, il est respectueux, il est intelligent, il fait la cuisine et la lessive, il défend la veuve et l'orphelin, il aimerait que le monde soit meilleur. Je vous jure, c'est Miss France. L'épaisseur d'une figurine en carton d'Orlando Bloom dans votre chambre.
-Ivy est la classique étagère vide sur laquelle la lectrice est censée projeter sa personnalité : elle est jolie mais peu sûre d'elle, timide mais caractérielle, elle aime lire, elle aime les fraises. Voilà voilà…
-Le père et la soeur d'Ivy sont des manipulateurs absolus (là, je vous mettrais bien une photo des Ténardiers) ce qui est évident dès le début et tout le long du roman, mais qu'Ivy ne voit pas, parce que, ah oui, j'ai oublié de le mentionner, mais elle est complètement bête, cette pauvre fille.
Le père de Bishop est loin d'être le tyran absolu qu'on veut nous figurer, ce qui est aussi évident dès le début. Et il a été amoureux de la mère d'Ivy, ce qui est, dès qu'il mentionne le sujet, aussi équivoque que la présence de lipides dans votre McDo. Mais il faut du temps à Ivy pour voir tout ça. *LITTÉRALEMENT TROP STUPIDE POUR QUE JE T'INSULTE*

...Par ailleurs, le personnage d'Ivy…

1) Quoi ? Mon père m'a menti sur l'assassinat de ma mère, qui était ma raison n°1 de haïr le régime? Je vais quand même continuer à lui faire confiance, parce que je suis bête et que le développement de ma personnalité est complètement incohérent.
2) Quoi ? le tyran n'est pas aussi méchant que je croyais ? Je vais quand même persister dans mon projet de tuer son fils, dont je suis amoureuse, parce que… euh… euh… Ah oui ! Je fais confiance à mon père, qui a forcément raison puisque c'est un homme même s'il passe son temps à me manipuler et que j'en suis consciente. (Citation : « Lorsqu'on est conscient d'être manipulé, mais que ça fonctionne, peut-on encore appeler ça de la manipulation ? » Je vous laisse pondérer.)
3) Quoi ? Mon père et ma soeur me trahissent ? Je ne l'avais pas vu venir ! Je vais me dénoncer à leur place, même si ça me fait perdre mon amoureux, ma vie, et littéralement tout ce dont je rêve, et alors même que ça fait 100 pages que je me méfie d'eux, parce que si je faisais la seule chose cohérente, c'est-à-dire tout révéler à BG, ça se terminerait en 2 pages et je ne pourrais pas traîner ma carcasse angoissée et ma cervelle molle jusqu'au tome 2. Eurk.

*Des péripéties originales (lol)
Déjà, des péripéties, euh… y en a pas trop. On s'ennuie comme une paire de tongs au mois de janvier. Ensuite… laissez-moi vous présenter la plus belle série de clichés jamais rencontrée :

-Le beau-gosse qu'on croit que c'est un salaud mais en fait trop pas
-Le beau-gosse qui emmène l'héroïne en balade dans les bois (Edward ? C'est toi ?)
-C'est l'occasion de se mettre en maillot de bain (car l'auteur a 13 ans d'âge mental et être en maillot avec un garçon, c'est excitant)
-On espionne le BG qui part pour une sortie suspecte et ô surprise, en fait, il allait donner de l'eau à une petite fille assoiffée (j'ai déjà dit qu'il était parfait ?)
-La seule fois où le BG s'énerve et fait preuve de force, c'est pour menacer son pote qui bat sa copine (parce que, je sais plus si je l'ai déjà mentionné, mais il est parfait)
-La belle-mère est ENCORE une horrible belle-mère (S'agirait d'en finir avec l'héritage Perrault/Grimm/Andersen, non ? Il y a de meilleures choses à en retenir…)
-Pour apprendre à se connaître, le BG et l'héroïne jouent à Action ou Vérité (Oui. Vous avez bien lu. Si l'âge mental de l'auteur était encore ambigu, maintenant vous êtes fixés.)
-La scène d'Action ou Vérité mène à…. Roulements de tambour……………………………………………... …Leur premier baiser ! Yep.

*Un rythme haletant (XD)
Le XD c'est parce qu'il ne se passe vraiment rien, dans ce roman. Ivy est mariée à Bishop, et les 300 et quelques pages sont consacrées au développement de leur relation, ce qui est très long quand il n'y a strictement aucune alchimie entre eux deux. Difficile d'être émoustillée.

*Un fond éthique fort sur le mariage forcé, la place de la femme, la vision des sexes (WARNING ! Ce roman craint.)
Ce roman dénonce régulièrement la situation des femmes battues, ou simplement mariées de force, avec la discrétion et l'élégance d'un marqueur véléda sur du papier buvard. À la limite, c'est maladroit, mais ça part d'une bonne intention. Bravo !

Sauf que. Malgré elle, l'auteur sous-tend son intrigue sur des conceptions archaïques et ultra craignos. Démonstration : la principale raison pour laquelle Bishop (BG) nous est présenté par Ivy comme vraiment exceptionnel, une petite perle de gentleman, un diamant parmi les cailloux, c'est que Bishop n'essaie pas de la violer.

Ah, vous aussi, ça vous fait tiquer.

Je rappelle que c'est un roman post-apocalyptique, donc futuriste, et que l'on vit dans un état de droit hérité de celui des USA. En toute logique, les jeunes filles ont zéro raison de trouver merveilleux de ne pas se faire violer.

Or, dans cette pépite de roman, toutes les jeunes mariées s'attendent à être mises sur le dos de force, et Ivy est infiniment reconnaissante envers Bishop de ne pas la violer. J'emploie encore ce mot car l'auteur et ses lectrices ne réalisent pas de quoi on parle. Non, Bishop n'est pas un gentleman, c'est un être humain ordinaire et décent : ça lui semble normal de ne pas s'en prendre sexuellement à une fille sans son consentement et, en cela, IL N'EST PAS UN DIAMANT PARMI LES CAILLOUX, mesdemoiselles, mais à la limite UN CAILLOU PARMI LES CROTTES DE CHIEN.

Le pire, c'est que l'on comprend sans peine, vu ce que dit et pense Ivy, que si Bishop avait tenté quelque chose, elle aurait probablement accepté son sort, car après tout, ils sont mariés, et c'est bien normal qu'un garçon veuille coucher avec sa femme ! C'est son droit ! *J'ai vomi dans ma bouche*

En résumé : honnêtement, sur la majeure partie du roman, j'ai bien rigolé. Oui, c'est assez cliché et nul pour en devenir drôle. Mais si ç'avait été simplement nul, je n'aurais pas insisté : c'est le fond malsain qui m'a poussée à continuer*, car ce roman méritait d'être chroniqué avec un oeil détaché, et non pas énamouré.

Je vais tout de même finir sur un truc que je ne pensais pas dire de sitôt :

Entre les clichés épuisants, le style consternant, les conceptions hommes-femmes archaïques, et la traduction neuneu, ce roman a gagné la

MÉDAILLE TWILIGHT

Et vous savez quoi ?

Il est même *plus mauvais* que Twilight.

[Si vous voulez lire cette chronique en version complète (c'est-à-dire, avec ses GIF, c'est plus fendard, cliquez sur le lien ci-dessous]
Lien : http://allezvousfairelire.co..
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