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Critique de ODP31


A faire tilter des « sensitivity readers » !
En français, au choix, les éditeurs les surnomment des préventeurs d'emmerdes ou des renifleurs à scandales, les écrivains les voient davantage comme des parapluies ouverts en plein soleil ou des démineurs de sève et les mauvais esprits comme moi auraient plutôt tendance à les classer dans la catégorie des édulcorants de la cédille ou des nouveaux « Père la vertu » (ou mère ou tout autre genre, animal ou végétal) immatures.
Dans tous les cas, ces affreux relecteurs zélés chargés de « guimauver » les romans pour les rendre solubles aux offensés du premier degré devaient être partis en séminaire « feel-good, barbecue et autodafé » au Canada (dry), déboulonner quelques statues ou phosphorer sur le sexe des anges opprimés quand le manuscrit de J.M Erre a circulé. Avec ces yeux fades, le roman aurait surement ressemblé à une carte postale biffée par la Stasi avant de se faire le mur.
L'auteur rappelle au secours Julie, son héroïne insolente et tétraplégique du savoureux « Qui a tué l'homme-léopard ? », qui écrit des histoires pour semer son handicap et se moquer d'une humanité d'apparence valide.
Entre chaque réflexion à la sulfateuse de la dérision sur sa condition, Julie nous raconte une petite fable de sa composition. Un curé de campagne qui entend la voix d'un Dieu taquin qui incarne chaque jour une religion différente, un jeune homme lassé des conversations de réveillons qui veut vérifier scientifiquement l'adage « c'était mieux avant… », la résurrection d'un dépressif contagieux, un certain Michel H, ou encore un humoriste qui ne fait rire que de lui. Tout y passe. Certains y trépassent.
Les nombreuses références aux personnages de tous les autres romans de J.M Erre raviront les fidèles sans perdre les bizuths qui vont découvrir l'écrivain que je trouve le plus drôle actuellement (chaque phrase est une citation, un joli sourire par page minimum garanti et je ne travaille pas chez Darty !) et il nous offre ici un pot-pourri de ses textes parus dans Fluide Glacial mais que je découvre ici si habilement reliés dans une seule histoire.
Derrière son humour et ce titre délicieux, le sujet du livre, c'est justement de se moquer d'un ton léger de cette évolution qui proscrit toute « appropriation culturelle » comme disent les éveillés qui doivent manquer un peu de sommeil, qui promeut la réécriture de classiques pour apprendre à l'Histoire à bien se tenir, qui interdit à un acteur d'incarner un genre ou une sexualité qui n'est pas le sien.
Ne lisons-nous pas pour échapper à notre emballage et à ce que nous connaissons ? Faut-il qu'un acteur reste prisonnier de son rôle ?
J.M Erre est un universaliste qui met tout le monde dans le même panier percé mais il ne prend pas tout cela trop au sérieux. Il n'est pas prêt de tirer son irrévérence.
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