Original et simple. Il n'est pas question pour Nico de rivaliser avec les virtuoses du rock des années soixante. Elle se choisit un instrument encore vierge de tout karma rock, qu'elle va pouvoir s'approprier, marquer de son empreinte. En outre, l'harmonium, ceux qui ont vu Allemagne année zéro le savent bien, c'est le son, la musique même des ruines de Berlin (Ombra mai fu).
L'exil n'est pas moins temporel que spatial. Elle joue avec l'idée de redevenir blonde, mais se trouve "trop vieille, maintenant". Elle a beau dire qu'elle n'a "pas le temps de devenir un cliché", où qu'elle aille, on lui demande de réinterpréter les classiques du Velvet Underground, d'évoquer les ombres de Lou Reed, de Warhol, de Jim Morrison. A Berlin, où elle habite chez les parents de Lutz, David Bowie est en train d'enregistrer Low et "Heroes". Depuis des années, Nico écoute en boucle "Cygnet Committee". Dans l'espoir qu'il produise son prochain album, elle glisse un message sous la porte de l'appartement de Schöneberg qu'il partage avec Iggy Pop : "Je veux te voir." Le Thin White Duke lui fait répondre : "Je ne veux pas te voir."