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Critique de ClaireBangert


"Dans le secret". Jérôme Ferrari



"Tout va bien.'

Point final.
C'est la dernière phrase du livre, que j'ai fini aux premières lueurs de ce dimanche d'octobre...

Tout va bien ??

Non. Rien ne va bien à la lecture du livre de Jérôme Ferrari.
La Corse est constamment sous la pluie, les hommes ont perdu la foi, l'humanité dégouline de désespoir.
Rien ne va pour Antoine, ni pour son frère, ni pour ceux qui les entourent
(...)" et il se sentait enveloppé de tristesse et de nuit. Comme si tout chose était un morceau de tristesse matérialisée."

A cause d'une phrase prononcée dans un demi sommeil par sa femme, Antoine se confronte, et nous met face à ses démons les plus intimes .
Aucun espoir n'émerge des mots de Ferrari ("Cesse de pleurer sur la vie que je n'ai pas eue, lui écrivait-il, le possible n'existe pas. C'est la vérité et c'est une consolation. La seule.")

Nous sommes engloutis dans les entrailles nauséabondes des secrets de cette famille où les bassesses des uns font écho aux inconséquences des autres.

L'introspection est visqueuse, sanglante, sans appel et sans rédemption possible.
Réflexion désabusée et sans complaisance, ce livre m'a laissé un sentiment confus, entre colère et violence.
Comme toujours chez Ferrari, les mots sont justes, cinglants, implacables.("Il s'était tu comme s'il savait que la vie était difficile et laide, jusque dans la futilité et l'insignifiance de certaines blessures qu'elle nous inflige.")
Les personnages sont embourbés dans la désespérance et nous ne pouvons que constater la lente mais inexorable noyade de leur humanité.

Colère, oui, devant la faiblesse amorphe de ces hommes qu'on voudrait arracher à leurs ténèbres, viscéralement .("La vérité est que je suis un de ces êtres faibles qui ont besoin d'une raison de vivre et dont la faiblesse est si parfaite que, ne trouvant bien sûr aucune raison, ils n'en continuent pas moins de vivre.")
Violence, aussi, parce que des "secrets" suitent tellement de fatalisme qu'on voudrait pouvoir s'extraire de la noirceur dense et compacte des désillusions des personnages, mais qu'elle nous maintient la tête sous l'eau...

Alors, je suis bien aise que ce dimanche d'octobre m'ait permis de refermer le livre sur des allures d'été indien, parce que, incorrigible optimiste, je reste persuadée qu'on peut y arriver.

Bien sûr, l'actualité me renvoie trop l'image du désenchantement des hommes, mais je veux continuer à y croire...
"Dans le secret", aussi sombre soit-il, m'aura au moins permis de me dire : je suis vivante ! Tout va bien.
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