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Critique de Patsales


Lisez ce livre, il vous brisera le coeur.
Pas parce qu'il raconte avec des détails atroces comment des prisonniers australiens ont construit la Voie ferrée de la Mort. On l'a lu ailleurs (pas forcément avec cette acuité).
Pas parce qu'il nous rappelle que l'amour fou est une impasse. On l'a lu ailleurs. Depuis Tristan et Yseult, c'est toujours une très mauvaise idée de désirer la femme de son oncle.
Pas parce le monde est un palais des mensonges. Où chacun tente désespérément de trouver un sens à ce qui lui arrive. Être heureux qu'un autre que soi agonise, battu à mort, parce que vous mourez de faim et qu'il vous a volé un oeuf; et être désespéré de retrouver cet oeuf au fond de sa cachette. S'ingénier à devenir bon après avoir été criminel de guerre; découvrir que cette bonté, cet oubli de soi, avait aussi permis de commettre des atrocités pour mieux complaire à l'Empereur. Croire que ne plus porter de blouse blanche suffira à expier d'avoir aidé à disséquer un homme vivant.
La très belle photo de couverture dit la même chose. Elle nous trompe sur ce que nous réserve le livre, comme la vie trompe et illusionne - et pas seulement les personnages de roman.
Le monde est menteur et décevant. Mais ça aussi nous l'avons déjà lu.
Non, ce qui est bouleversant dans ce livre, c'est le secret que Dorrigo Evans partage avec nous: il n'a été un homme digne, en accord avec lui-même, que dans l'enfer et l'abjection.
Être un homme malgré l'horreur des camps de concentration disait Primo Levi. Dorrigo, lui, comprend qu'il a été un homme non pas malgré mais à cause de la barbarie. Et même s'il refuse d'être considéré comme un héros, il sait que, par les sacrifices qu'il fit, l'attention qu'il porta aux prisonniers, l'humanité dont il ne se départit jamais, là-bas, dans le camp, il justifie cette barbarie.
Plus tard, Dorrigo n'aime pas sa femme. Il la rend malheureuse. Et il n'a de tendresse pour elle qu'au moment où, au péril de sa propre existence, il lui sauve la vie.
La route est étroite vers le nord lointain et les héros sont des salauds parce que nous avons besoin d'eux et qu'eux ont besoin que le malheur existe.
Oui, vraiment: lire ce livre brise le coeur.
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