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Critique de Belem


Belem
02 septembre 2013
Aux temps exaltants du socialisme utopique, Charles Fourier élabora un état « sociétaire fondé sur l'emploi de la vérité et de l'industrie attrayante », destiné à remplacer la société actuelle où « règnent le mensonge et l'industrie répugnante ». Il livre le détail de son système utopique dans cet ouvrage qui paraît aujourd'hui un peu farfelu. Il s'agit, en gros, de remplacer les villages et villes par des « phalanstères » composés de 1800 personnes, communautés régies par des principes d'attraction « naturelle » entre individus, et non de devoir, de nécessité mensongère. Fourier développe sa théorie des « séries passionnées » (satisfaire nos sens et nos passions), qui se veut une étude de la vie en groupe, afin de mener à l'harmonie entre tous les êtres.
Son traité est si précis, rentrant dans les moindres détails et aspects de la vie collective (jusqu'à créer des groupes ayant une affinité... concernant le goût de la soupe!) que Marx en dira (dans « Le manifeste du Parti communiste ») que Fourier « tente de plaquer sur la réalité sociale mouvante une organisation […] fabriquée de toute pièce ».
C'est toute la différence avec le socialisme scientifique dont se réclameront Marx et Engels, qui explique comment les contradictions d'une forme d'organisation de la société se solde par l'avènement d'une organisation sociale nouvelle, mais qui se sont précisément toujours refusé à décrire ce que sera la société communiste. Car une nouvelle organisation est le produit d'une histoire, et non celui d'un seul cerveau, fut-ce t-il génial.
De plus, comme souvent avec ce genre de génial inventeur, il n'échappe pas à un brin de mégalomanie. Fourier dit « on fera des fautes innombrables dans une fondation sociétaire où je ne serais pas présent. »
Cela dit, il y a quelques aspects intéressants dans le traité : la critique du mode mensonger sur lequel fonctionne le commerce, la critique de la morale bourgeoise, et une réflexion globale sur le travail et sa finalité. Ainsi, il développe l'idée d'un travail rendu « attrayant », pratiqué par plaisir, dans lequel Engels verra « un grand axiome de philosophie sociale ». Il prône pour cela l'idée de courtes séances de travail (2 h. maximum, encore moins pour les travaux pénibles).
A noter que, comme de nombreux socialistes utopistes, il émet quelques idées innovantes qui préfigurent les préoccupations des écologistes et environnementalistes d'aujourd'hui (mais qui, eux, ont abandonné les vues socialistes sur le travail). Ainsi, le coût exorbitant en énergie que coûte la vie en cellules familiales (composées en moyenne de 3 à 5 personnes) : « Une seule cuisine, préparant pour 30 convives, sera meilleure et moins coûteuse que trente cuisines séparées ». économie de combustible, économie de travail, économie de temps, etc...
Un traité social un peu loufoque par moments, mais, globalement, une grande bouffée d'air frais sur ce que pourrait être la vie des hommes et des femmes dans un autre système économique et une autre forme d'organisation sociale, qui rompt avec le « There is no alternative » enfumant les esprits de l'époque grise que nous traversons.
Vive l'utopie !
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