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Critique de palamede


Frances Larson, chercheuse passionnée du musée Pitt Rivers de l'université d'Oxford, célèbre pour sa collection de têtes réduites, nous plonge dans le bain de l'histoire étrange et fascinante de la tête coupée.

Lieu hautement symbolique du corps humain, la tête est décrite ici par l'anthropologue comme on ne ne la voit jamais ou presque (et pour cause, puisque séparée du corps). Siège du cerveau supposé abriter l'âme, la tête humaine qui héberge pas moins de quatre des cinq sens, et de ce fait assure le lien entre l'extérieur et l'intérieur du corps, devient ainsi sa partie la plus expressive et objet de tous les fantasmes.

En explorant les multiples manières dont l'homme obtient, utilise, met en scène une tête humaine coupée, Frances Larson cherche à percer le mystère de la fascination qu'elle exerce sur les hommes — prenant pour exemples les têtes réduites par les Shuars d'Amérique latine sensées leur transmettre leur force, ou les têtes de saints, reliques vouées à l'adoration, ou bien celles des décapités par l'épée du bourreau ou par la guillotine, dont on va essayer de déterminer l'instant de la mort.

De façon générale, des exemples qui montrent que l'homme transforme la tête en objet pour se l'approprier ou mettre à distance l'ennemi, telles les têtes trophées des soldats de la guerre du Pacifique (cf. la photo de couverture). Des têtes qui, comme au musée Pitt Rivers, peuvent aussi être considérées comme des oeuvres d'art. Au même titre que les têtes peintes de Géricault, plus inoffensives, comme le sont aussi les têtes disséquées par les étudiants en médecine ou celles soumises à la cryogénie par leur propriétaire, espérant bénéficier des progrès de la science. Une évolution pacifique, toutefois contredite aujourd'hui avec la diffusion de décapitations sur Internet, attirant des spectateurs nombreux.

Le résultat de cette étude est étonnant, quelquefois effrayant et spectaculaire. On ressort de cette lecture fasciné par les implications mises en lumière par l'historienne, relatant des anecdotes éclairantes sur nos croyances, nos pratiques et nos peurs. Un travail rigoureux, non dénué d'humour, absolument passionnant, qui nous fait voir à quel point les têtes coupées nous rappellent notre fragilité, et nous poussent à regarder en nous-mêmes à la recherche de notre humanité.
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