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Critique de Unchatpassantparmileslivres


Philosophe de formation, Hélène Frappat propose un essai féministe qui traite sous un angle original l'un des outils de domination du patriarcat : la décrédibilisation de la parole des femmes.

Elle examine un concept, qu'elle appelle le gaslighting, une technique de manipulation qui consiste à persuader une personne qu'elle perd la raison en lui répétant que toutes ses perceptions sont fausses. Les Québecois utilisent les termes «décervelage» ou «abus cognitif».
Ce terme a pour origine une pièce de théâtre adaptée en film en 1944, Gaslight (Hantise, dans la version française), dans lequel un mari essaie de faire perdre la raison à sa femme pour s‘emparer de son héritage.

L'auteure constate que dès l'antiquité grecque, le discours des femmes est méprisé. Aristote considère la femme comme déficiente par rapport à l'homme et n'a de cesse de chercher à établir biologiquement l'infériorité de la femme : elle est du côté du mauvais, de l'imparfait, de l'humide, sa voix aiguë «prouve» son infériorité et son impuissance, etc. C'est une des raisons affichées, dès cette époque, de la domination et de l'emprise des hommes sur les femmes.
Elle met en évidence le gaslighting à l'oeuvre dans une quantité de livres et de films, des mythes grecs à Alice au Pays des merveilles.
«La parole vraie de Cassandre, qui suscite l'incrédulité, est inefficace. Elle est la première d'une longue lignée de femmes non crédibles. le mythe de Cassandre raconte la voix impuissante, le langage évaporé, la vérité privée de crédibilité, donc de réalité, de la femme gaslightée».
Devenu au XXème siècle un outil de la psychologie aux Etats-Unis, il s'échappe ensuite de la sphère privée ou médicale pour s'étendre à la société patriarcale tout entière, lors du mandat de Donald Trump. Qu'on le nomme ainsi ou «fake news» ou encore négationnisme, il s'agit toujours de brouiller les frontières entre le vrai et le faux et cet usage en politique révèle une crise des démocraties contemporaines.

L'outil préconisé par l'auteure est la mise à distance des paroles du gaslighter et leur retournement par l'ironie. Mais nous avons certes besoin de grands changements systémiques et de repenser les rapports hommes-femmes en public et dans l'intimité.
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