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Critique de Korat


Bon livre, carton rouge à l'avant-propos !
Tardivement retrouvé, le manuscrit recelait six récits ; les deux derniers furent perdus. le narrateur, Shen Fu, un Chinois du XVIIIe siècle de bonne famille, mais ayant échoué aux examens, y relate sa vie. On entre facilement dans ce récit à la fois très dépaysant et humainement si proche de nous. L'amour conjugal, les querelles familiales, la pauvreté, les épreuves, la vie quotidienne se lisent dans une traduction fluide. On y voit l'épouse, Yun, fabriquer un plat en forme de fleur pour y disposer les mets peu abondants qui accompagnent les boissons, vendre ses bijoux pour acheter de quoi boire aux invités, chercher une concubine pour son mari (quelle épouse aimante !), faire assaut de poésie. Son mari cherche désespérément des ressources, travaille, emprunte, se crée des dettes, voyage, se livre aux joies de la culture de bonsaïs… La dernière partie est une sorte de revue des plus beaux sites visités par l'auteur, et propose une réflexion sur la nature et l'artifice, et la jouissance poétique des paysages avec des amis (et de l'alcool). Parmi ces curiosités, signalons le passage sur les « Bateaux-de-fleurs» des prostituées de Canton, où le narrateur se montre à la fois « gentil » avec la jeune prostituée qu'il a choisie et assez indifférent à son sort.
Ce récit apparemment authentique, publié de façon posthume, pose de multiples questions. A qui le texte était-il destiné ? Quel était l'objectif du narrateur ? Quelle est la vérité sur ses dettes, ses emplois instables, sa brouille avec son père ?
Cependant je ne peux passer sous silence l'odieux avant-propos sexiste et raciste du traducteur, qui écrit :
« En décrivant Yun, son épouse, l'auteur a donné de la femme chinoise (sic) la plus fascinante image qu'on puisse trouver dans la littérature (je livre d'ailleurs le portrait de cette admirable et fougueuse personnalité à la méditation de certaines dames féministes (re-sic) qui croient que la femme chinoise a dû attendre jusqu'à 1949 avant de pouvoir accéder à l'existence.) »
Si Simon Leys avait pensé sans a priori à son texte, il se serait souvenu de nombreux passages où Yun, tout comme son mari, regrettent que les femmes ne soient pas libres.
« Quel dommage que vous soyez une femme et ne puissiez sortir librement ; si vous étiez un homme, nous pourrions faire des voyages ensemble, visiter les sites et les monument célèbres, et courir à l'aventure à travers le monde ! » Lors d'une fête, Yun s'exclame : « Quelle pitié que je sois une femme et ne puisse m'y rendre ! » (p.43). Et sur la suggestion de son mari, elle finit par se déguiser en garçon pour pouvoir sortir...
Cet avant-propos semble dater des années 50 ; pourquoi ne pas le remplacer ??
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