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Critique de ElGatoMalo


Putain ! Encore une histoire de femme ! Enfin de petite femme. de nana, quoi ! Mais pas de Nana à la Zola. Dans le genre feuilleton, c'est plutôt les mystères de Paris avec des misters qui sont loin d'être des mylords et une Boule de Suif qui aurait fait de l'anorexie : on compte facilement ses cotes et, elle, ses abatis plusieurs fois dans l'histoire. C'est qu'elle taquine l'apache, la coquine. Et l'apache, lui, il [s'] arsouille sur la piste des tapineuses fin de siècle. Même pas de la demi mondaine. de la fille de joie façon ruisseau. Poussée à même le pavé. Directement dans la rigole mais qui rigole pas trop parce que la seule porte ouverte qui lui reste à la promotion sociale est celle d'une maison close. Et oui : une lanterne rouge éclaire les nuits de cette cendrillon sans prince charmant qui se marchande elle-même et si quelqu'un en pince pour elle c'est surtout pour la faire marcher et arpenter le ruban, comme elle dit, pour rapporter l'argent piqué au miché. Faute de potiron, pour se payer un carrosse, elle se rabat sur la bonne poire : le client de passage auquel elle cède un droit sur sa viande quelques minutes, des fois moins, le temps d'un pseudo coït. Michetonneuse donc. Et l'atmosphère, qui ne sent pas la rose, a une drôle de gueule, celle de l'esclavage sexuel volontaire. La miss ayant quitté son brave et gentil Matelot pour des amiraux du milieux qui ne sont pas si amicaux ni si admirables. Ce sont de pures canailles. Des malfaisants. En un mot du gibier de potence mais promis à la guillotine. Des velus en casquettes et rouflaquettes dont le seul avenir est d'être rasé de vraiment très près par une grande bise de métal froid au petit jour.

En attendant que le couperet tombe sur son bonhomme, la petite, elle, tombe la veste avec enthousiasme. Et tout le reste aussi. Assez facilement, pas besoin de se faire prier. Elle se prête avec complaisance au bon vouloir du scénariste qui lui fait tenir des discours plus que douteux. Marthe Richard doit se retourner dans sa tombe (enfin... juste un peu, la Marthe ayant elle aussi lourdement donné coté prostitution dans la maison close d'abattage avant de se ranger des charrettes avec une bonne syphilis pour se marier à un mylord anglais).

Ce serait son choix et son plaisir - par ici la ligne blanche, à cette époque la cocaïne est en libre service, c'est pas dans l'histoire mais j'évoque, j'illustre, j'enlumine un peu pour dresser un portrait du tournant du siècle. Et ce choix serait justifié par l'obsession de ne pas devenir un autre type d'esclave, condamné celui-là à une peine à vie par la grande machine capitaliste. Condamné à être sacrifié au Moloch qui dévore homme, femme et enfants (les deux derniers à demi tarif). La bête immonde qui a déjà tué sa mère et qui assassine son père. Ce pauvre vieux dans le fil de l'histoire essaye de la tirer de cette vie de misère morale. Y s'y prend mal, le gonze. Sa seule récompense sera de se faire lourdement tabasser par le marle - le maquereau - du moment de sa fille.

Mais, honnêtement, cette argumentation - échapper à un esclavage, celui des damnés de la terre, pour aller vers cet autre des forçats du sexe - c'est tomber de la cocotte minute (si j'ose dire, la plupart des clients en viennent à tirer leur coup en moins de soixante secondes pour rentabiliser les nuits de ce drôle de titi parisien) dans la poêle à frire. Ce qui ne veut sans doute pas dire grand chose et doit être sans grandes conséquences parce que finalement elle a le feu au cul cette gamine. Et le vice dans le sang. Déjà enfant, elle acceptait d'échanger ses baisers contre des cerises. Volées, les cerises. Mais les baisers, eux, étaient tarifés : un baiser, une cerise. Mangées goulument. Un signe fait à cette Amélie élie (y'a de l'écho ?) que sa vie ne peut être qu'un drôle de mélo emmêlé pêle-mêle avec les embrouilles des petits malfrats parisiens...

C'est plutôt bien amené. On lit l'ensemble d'une traite si j'ose dire - encore une fois - le regard fixe à hauteur des mamelles de l'héroïne, plutôt avantageuses et pas trop mal dessinées, ceci dit. Les cadrages font surtout dans le mélange des corps, c'est de bonne guerre. Ce n'est pas une enquête sur l'évolution de l'urbanisme en 1900 non plus. Alors faut pas chercher des décors somptueux, c'est pas le sujet. Après, on pourra toujours discuter de l'intérêt d'une histoire comme celle-là quand la loi Française condamne depuis le début de l'année 2014, les clients actuels des prostitués à la somme folle de mille cinq cents euros. Mais, franchement, c'est rien à coté de ce qu'une honnête épouse peut piquer à son laborieux mari en un seul et unique divorce pour le plus grand bien et la plus grande joie de tous les rapaces et autres charognards qui profitent des cadavres de tous les mariages ratés.
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