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Critique de Arakasi


Il y a une peur commune à toute la gente masculine dont on ne parle jamais. Trop crade. Trop cru. Trop gênant. Pourtant et à mon humble avis, il n'existe pas un mec sur Terre à qui ce ne soit pas arrivé : la peur de ne pas y arriver, la peur de ne pas être à la hauteur, bref la peur de ne pas bander. Et, bien entendu, cette peur s'accentue en vieillissant alors que le corps commence à trahir et que tenir une érection plus de deux minutes devient un parcours du combattant. C'est à cette dure épreuve qu'est confronté Jacques Rainier, 59 ans, industriel sur le point de faire en faillite. Vous me direz : c'est notre lot commun, inutile d'en faire un drame. Mais voilà, Jacques Rainier est amoureux, fou amoureux d'une brésilienne d'une vingtaine d'années qui lui rend fougueusement son affection. Quand on n'aime pas, la perte de la virilité est déjà rude à encaisser mais, quand on aime, c'est un calvaire. Car il faut bien combler la femme aimée, lui prouver jour après jour qu'on la désire toujours et éviter à tout prix de voir l'amour se transformer en pitié, le désir en maternalisme. Alors on utilise des béquilles : fantasmes tordus, drogues, médicaments… Mais combien de temps pourra-t-on tenir à ce rythme ? Combien de temps si l'on veut continuer à se considérer comme un homme d'honneur et même un homme tout court ?

Ce livre m'a été frileusement conseillé par mon père qui en avait gardé un souvenir un brin traumatisé. Il faut dire que le sujet est sensible, très sensible et particulièrement pour l'auteur lui-même qui vivait très mal son propre vieillissement. Dans ce roman à fort parfum autobiographique, il a mis beaucoup de lui-même, livrant avec une honnêteté désarmante au lecteur ses angoisses les plus inavouées. Tout le long de son récit, il garde une distanciation amusée, montrant tout ce que la perte de la virilité a de superficiel et de profondément terrifiant à la fois. On en rit, bien sûr, on s'en moque mais seulement pour contrebalancer l'humiliation d'avoir à confesser ses faiblesses à un médecin ou d'entendre sa bien-aimée dire : « Ce n'est pas grave, mon chéri. On essaiera de nouveau la semaine prochaine. » Certains ont vu dans la fin un message d'espoir, mais je ne suis pas sûre de l'interpréter dans ce sens, peut-être plutôt comme une ultime reddition de la vieillesse face à la jeunesse, un dernier sacrifice de Rainier à son aimée. A chacun son interprétation. Un bon livre sur un sujet difficile.
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