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Critique de Noetique01


Il n'y a pas de progrès continuel en métaphysique sur le même mode qu'en technologie, il y a plutôt un approfondissement « sur place ». Quel approfondissement apporte le christianisme à la métaphysique ? La philosophie chrétienne s'inscrit-elle dans le cadre de « l'oubli de l'être » ? Heidegger a une démarche légitime mais, à en croire Gilson, celui-ci montre une ignorance de la profondeur des métaphysiques du XIIIe siècle. On le sait : la religion n'a pas besoin de philosophie pour s'instituer. Et, pourtant, le Dieu chrétien viendrait permettre à l'être sa véritable expression. Ce serait en effet dans une pensée thomiste de l'acte d'être, dans une distinction de l'être et de l'essence, qui viendrait positionner celui-là au-dessus de celui-ci, que l'on retrouverait la pensée ontologique la plus adéquate ; et il ne suffirait donc pas du tout de faire éclater l'existence à partir de la simple actualisation de l'essence. Ce que l'on dénonce sous le nom « d'ontologisme » serait essentiellement l'oubli de l'intellect agent. « L'oubli de l'être » dénoncé par Heidegger ne se retrouve pas dans le thomisme authentique, pas plus que la réduction de l'être à l'étant – l'être est avant tout un acte par lequel l'étant est, par lequel l'ens est effectivement informé par l'esse, puisque l'étant est composition de l'essence et de l'existence. L'acte d'être mène l'essence à l'existence sans que ce passage ne se fasse en vertu de la seule essence (comme chez Aristote, en quelque sorte). On le sait : les métaphysiciens ont souvent été opposés aux choix des transcendantaux à adopter. On peut citer le conflit entre l'intellectualisme et le volontarisme en guise d'exemple. En fait, tous ces choix sont des hésitations entre plusieurs vérités. Seul l'être est principe premier et, en tant qu'être, il est avant tout un acte. Il inclut également tous les transcendantaux. On notera aussi des analyses sur la causalité, qu'on ne pose pas pour éviter la contradiction mais bien pour rendre raison de l'être : Gilson refuse de faire de la cause un transcendantal, si bien que tout être n'a pas forcément de cause a priori, mais il accorde une importance à sa distinction du principe, qui n'était pas claire chez les Grecs. Là, la différence entre le thomiste et l'aristotélicien originel est la suivante : le refus de l'identification de la cause efficiente et de la cause formelle. In fine, quel est le premier principe ? le principe d'être, sans aucun doute, mais que peut-on en dire ? On pourrait soulever le principe de non-contradiction, puisque l'être est à lui-même : il n'est pas un justifiable, il est – il n'est certes pas de manière « axiomatique » principe, mais il est bien plutôt principe posé dans son propre acte. Quant au premier principe, il apparaît bien qu'il n'est la matrice de déductions positives, mais qu'il a bien plutôt un rôle critique, ce qui épargne les abus métaphysiques. Inutile de dire que Gilson fait ici le choix du réalisme (malgré une définition de l'idéalisme un peu rapide). On l'aura compris, cet ouvrage entend d'abord, en plus de montrer que c'est à partir du christianisme que l'être pur des Anciens devenait une réalité, que l'être est, radicalement.
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