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Critique de Levant


Voilà un ouvrage qui, autant que la biographie qu'il dresse, fait le point sur tout ce qui a été publié à propos de cet étonnant personnage qu'a été Agrippine, la mère de Néron.

Et voilà encore que je présente encore une femme relativement à un homme. Mais dans ce cas c'est un peu obligatoire. Car à l'époque où vécut cette femme ambitieuse et courageuse, ses semblables du deuxième sexe n'avaient pas voix au chapitre en matière de politique et gouvernance. Loin s'en faut, quelles que fussent leurs qualités et capacités. Pourtant dans les deux domaines précités, Agrippine pouvait en remontrer à beaucoup de ses congénères masculins.

Si je devais traduire en trois mots l'impression que me laisse cet ouvrage de Virginie Girod, ce serait objectivité, exhaustivité et crédibilité. Tout cela évidemment dument soupesé relativement à ma culture en histoire qui si elle se targue d'une réelle appétence en la matière est sans commune mesure avec ce que me confirme ce second ouvrage que je lis de la main de Virginie Girod.

Dans le rapport sexiste qui de tous temps a opposé homme et femme avec la relation de domination que l'on sait depuis que la faute originelle a été attribuée à cette dernière, Virginie Girod fait la part des choses avec, à mes yeux, une grande objectivité entre l'intelligence et la possibilité laissée à celui ou celle qui en était doué de la faire valoir. On ne trompera personne en affirmant pour ce qui est du faire valoir que nos consoeurs ont eu à contourner l'obstacle en faisant plus largement usage de leur charme. Qualité physique dont, selon Virginie Girod, Agrippine a eu à user avec plus de modération que ce que l'histoire a bien voulu colporter. L'objectivité est une disposition d'esprit d'autant plus difficile à soutenir qu'il est illusoire de prétendre juger une époque avec les critères psycho sociaux et moraux d'une autre. Dans la Rome Antique une femme aussi intelligente qu'elle fût ne pouvait faire valoir cette qualité en la transposant en décisions et actions que par le truchement d'un homme. Pour Agrippine cet homme ce fut Néron, son fils. Les autres, ses époux en particulier, n'ayant été que des marches pour accéder au pouvoir. Néron, né Lucius Domitius Ahenobarbus, fut malheureusement pour elle un mauvais levier pour faire valoir son intelligence politique. Mauvais au point de provoquer sa perte de la plus cruelle façon.

L'exhaustivité que j'évoque n'a rien à voir avec l'épaisseur d'un ouvrage qui ne négligerait aucun détail de la vie de son sujet. L'exhaustivité je la trouve dans la somme considérable de notes, tables, organigrammes généalogiques et références ajoutés par l'auteure en fin d'ouvrage, lesquels témoignent de l'étendue des connaissances de cette dernière dans sa discipline, du formidable travail de documentation mené à bien, de l'inventaire historiographique foisonnant ayant trait à cette femme hors du commun.

Cette objectivité, ce formidable travail d'étude et de construction de son ouvrage présentent à mes yeux d'amateur de la discipline une grande crédibilité dans chacune des allégations qui construisent cet ouvrage. Cette crédibilité, Virginie Girod la doit à l'analyse critique fouillée qu'elle fait des sources laissées à notre connaissance par l'érosion du temps. Il y a celles des contemporains d'Agrippine : Pline l'ancien, Sénèque, celles des historiens décalés mais ayant eu peu ou prou accès aux archives du palais : Suétone, Tacite, Don Cassius, et tous ceux plus tardifs qui n'ont fait qu'exploiter et interpréter les premiers. Profitant au fil des siècles de l'avancée des recherches et progrès dans les sciences afférentes : archéologique, numismatique, épigraphique, ethnographique, neuro sciences et tant d'autres. L'analyse critique qu'elle fait des différentes sources prenant en compte le contexte dans lequel les auteurs rédigeaient leurs ouvrages, tel un Suétone qui voulait plaire à son mentor Hadrien, un empereur de la dynastie succédant aux julio-claudiens, les antonins ou encore un Tacite « qui se montrait un impitoyable moraliste » vis-à-vis de femmes lorsqu'elles sortaient de leur rôle décoratif.

C'est donc mis en confiance par ces qualités que j'attribue aux deux premiers ouvrages que je lis de la main de Virginie Girod que je vais faire connaissance avec Théodora, l'impératrice de Byzance qui a fait ses premières armes dans le plus vieux métier du monde.
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