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Critique de livrevie


En refermant ce roman, je me suis rendu compte qu'un sentiment inhabituel m'avait envahie. Mal à l'aise. Je me sentais très mal à l'aise. L'avais-je aimé ? Je n'avais pas pu le reposer. Les pages m'avaient absorbée, elles avaient défilé tellement vite que la dernière page arrivée, j'étais déstabilisée. Déja ? Mais l'ai-je aimé ? Je suis incapable de répondre à cette question. Parce que j'ai le sentiment que dire que je l'ai aimé va à l'encontre de cette histoire. Comment peux-ton aimer le malheur humain ? La déchéance ? Comment peut-on aimer Ravensbrück ?

Suzanne, dite Mila, est arrêtée en 1944 avec tout son réseau de résistance et est envoyée au camp de Ravensbrück. Elle n'est pas seule. En plus de ses compagnes d'infortune, elle porte en elle l'impossible dans un camp. Un enfant.

La lente descente aux enfers, l'incompréhension, cette langue qui nous échappe et qui ponctue le récit, la faim, la saleté, la maladie, la mort qui se rapproche, inexorable, celle qui nous guette tous, prête à fondre sur nous comme un vautour sur sa proie.

Les coups, l’humiliation, l'épuisement, le désespoir... Mila veut survivre, ultime réflexe de vie. Les femmes veulent survivre : la libération est proche. Les rumeurs courent dans le camp. Bientôt, dans pas longtemps, il faut tenir.

Et au milieu de tout cela, la Kinderzimmer, cette nurserie qui accueille des enfants qui deviennent bien trop tôt des vieillards. Cette nurserie appel à la vie, mais ode à la mort. Cette nurserie qui donne une raison de se battre, pour eux, pour ces nouveaux nés, pour James, le fils de Mila. Cette nurserie qui donne un sens à leur vie.

Au camp, l'espoir ne tient qu'à d'infimes choses : les repas, la musique, la neige, les rencontres qui vous aident à tenir, la solidarité entre prisonnières.

En lisant les premières pages, les difficultés de Mila à comprendre cette langue, à apprendre les codes du camp, j'ai été ébranlée. Le présent de narration avait un côté dérangeant. Point de distance entre le récit et mon présent. Point de distance entre les personnages et moi. Le récit de Mila devenait mon présent. Il devenait mien. J'ai tremblé devant l'inhumanité des gardiennes qui préféraient nourrir les rats que les nouveaux nés, devant les sévices que devaient endurer les prisonnières, et comme toutes ces femmes, je me suis raccrochée à la vie. À Mila d'abord, puis à son petit James. L'âcreté de l’écriture m'a happée, m'a transportée, et m'a poussée à faire défiler les pages sans pouvoir m'arrêter. L'intimité de ce présent m'a donné honte, j'étais presque devenue une voyeuse en observant cette mère qui n'a plus de lait et qui presse son sein sec. Je ne me reconnaissais pas. Comme elles ne se reconnaissaient plus.

Ai-je aimé ce roman ? Je ne sais toujours pas. Mais une chose est sûre, il a laissé une empreinte indélébile en moi. Pour moi un roman magistral.

Lien : http://lelivrevie.blogspot.f..
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