Le mur comme les livres. La bibliothèque, l’étouffement.
Volumes rangés, verticaux, pierres, inertes.
Le mur n’est que figure. De même la paroi. Comment
pourrait-il en être autrement ? Même si, au départ, le
choix de cette figure est profondément vécu.
Il faut écrire et nous sommes coincés par le nom, par le
ciel, trop vastes.
Coincés, arrêtés par ce qui s’est levé devant nous. Peut-
être cela, simplement, un jour, cette prise de conscience.
Mais on ne peut être sûr ; cela ne semble pas suffire pour
expliquer.
Le mur, une face de l’échec.
Attendre. Les textes eux-mêmes souvent ne me semblent
pas des achèvements mais des témoignages d’un temps
qui est passé dans l’attente de quelque chose qui n’est
pas venu.
Le plus beau texte ne donne rien ; il permet d’attendre
encore, un peu plus loin.
Comme si les mots pouvaient sauver quelque chose.
Ils retardent au moins, un peu, la fin. Ils ne sont pas la
fin ?
***
On ne sait pas ce qu’il ferme.
***
Il faudrait que chaque mot pèse autant qu’une pierre.
***
Il n’a pas plus que nous de raison d’être. En ce sens
la partie est égale. Mais il dure plus longtemps, plus
facilement, que nous.
***
Je ne cesse pas, il m’arrête. Inerte, il m’abat.
***
Sans doute n’est-ce pas beau de finir ici.
***
Se laisser aller à la défaite. Perdre cet équilibre
uniquement fondé sur une force, une poussée. D’où la
lenteur extrême du travail.
***
N’être plus que cet effort bloqué. Parfois l’épuisement,
le désir d’en finir, à n’importe quel prix.
Et à nouveau, après, le désir de voir encore plus loin.
***
Pour celui qui est devant, tout ceci n’a que peu
d’importance. Sans cesse, et à certains moments, en feu.
***
Il faudrait que cela avance un peu.
Le mur comme envahissant. Renaissant dans la parole
qui s’oppose à lui.
***
Franchir devient rêve.
***
Tenir la position est déjà une victoire.
Il faut bien trouver quelque chose pour se soutenir.
Accepter d’être allé jusque là pour rien. Est-ce pour
rien ? Devant l’inerte. Le sans réponse.
Et, encore, ce qui se débat, devant, à certains moments,
comme presque pierre, ce qui se débat encore pour ne
pas devenir inerte.
Mur dévorant, nous devenant inertes, nous aussi, murs.
***
Le mur doit figurer tout ce qui empêche d’être.
D’où sa proximité et son renouvellement perpétuel.