« Como voz de
Cordillera,
En el rumbo de la cima
Rueda con toda su rima
Y prende la hermosa hoguera.
Con la lágrima sincera
Que enfrenta el mundo violento,
Grita al frío un juramento
Para que dure el segundo
De aquel eco más profundo,
Alza el silbido en el viento.
Telle une voix de Cordillère,
Sur la route de la cime
Il s'enroule autour de sa rime
Et allume le beau feu de joie.
Versant une larme sincère
Qui affronte le monde violent,
Il crie au froid un serment
Pour que dure la seconde
De l'écho le plus profond,
Surgit le sifflement du vent. »
Cordillera,
Delphine Grouès @delphine_groues @cherchemidiediteur #lespassemurailles
Veritable coup de ❤️, cet incroyable roman m'a cueillie là où je ne m'y attendais pas!
Comment vous dire?! Ce livre est à la fois sauvage et beau, poétique et rude, puissant et porteur 🔥 il contient la force des confins du Chili, de son peuple, de son histoire et de son humanité aussi! Il est âpre et lumineux, authentique et entier, comme ses personnages… comme cette famille Silva que l'on suit à travers ces pages, les pages de l'Histoire aussi, au début du XXe siècle…
« Ce qu'il ne dit pas à son fils, c'était la pestilence des champs de bataille, des corps pulvérisés, c'était la chair à canon, les tripes qui recouvraient le désert, la poudre, la vermine, c'étaient les cris des agonisants, les hurlements de terreur et de haine, les gestes de l'instinct, l'horreur du sang qui inonde tout, qui noie le sable, exorbités les yeux, les regards d'effroi, les derniers regards, les regards des longues-vues des officiers dans leurs uniformes rutilants, leurs uniformes à eux, les premières lignes, puants et râpés, dont les seules médailles arborées étaient des giclées noires. C'était tenter de ne pas penser que derrière chaque cadavre gît une famille, gisent la raison et l'espoir, c'était mettre sa main contre le coeur juste pour vérifier qu'il bat encore […] »
Une écriture puissante, prenante, envoûtante… un récit qui se tisse aux fils du destin, aux saisons de la vie, aux heures de la poésie aussi…
« Écoutez la première et la dernière goutte de pluie, celles de l'orage, celles qui raniment les êtres et les parfums, celles qui scellent les destins et s'échouent sur les rivages. Elles veulent tout dire. Tout. »
Combien de fois ai-je relu certains passages! non pas parce que je ne les avais pas compris, mais pour m'en imprégner davantage, pour m'immerger dans le roman, me laisser emporter par les mots de l'autrice, dans ce récit qui m'a fait voyager, vibrer… qui a profondément résonné en moi!
« de pourpre et d'ocre.
Le vin chuchote, serpente entre les grains, dessine des courbes, une oeuvre unique, éphémere, ancestrale. Qu'on ne dise pas que
c'est une tache.
C'est un hommage, un don à la Pachamama, la Terre Mère, la source de toute vie, la gardienne des monts, la complice de l'infiniment grand et de l'infiniment petit.
Le mot Pachamama a été inventé par les Andins. Esteban et Joaquín avaient tous deux souri en l'entendant. Mais la Pachamama palpitait en eux depuis toujours, ils la connaissaient, comme elle palpite en moi.
Ce qu'elle nous tend, on se doit de le cultiver puis de le partager comme ce vin, né de la Terre, revenant à elle.
Comme nous. Nés de la Pachamama, puis enfouis dans le sol, volatilisés dans la brise, nous reviendrons à elle.
Nous sommes de passage. Elle est le temps. »
Cette profondeur, cette magie des mots, cette plénitude qui m'a habitée le temps de cette lecture, comme un instant suspendu! Que c'était merveilleux, incroyable, unique… indescriptible!
J'ai « vécu » avec les personnages, me suis laissée emporter par leurs aventures, émouvoir par leurs peines, enchanter par leurs bonheurs… mais que mes mots sont faibles par rapport au foisonnement d'émotions ressenti! C'est si difficile de traduire mon émoi!
Pour une fois, les mots qui coulent de moi me semblent si peu de chose en comparaison de la grandeur du livre, des émotions multiples ressenties, vécues, explorées…
Que dire encore? Lisez ce livre, laissez-vous porter par cette plume d'une richesse incroyable, par cette aventure sur fond historique et humain (lutte des classes aussi, féminisme…) ce livre est sans commune mesure!
« Mais ce fut Cecilio qui poursuivit la conversation. Il prenait peu souvent la parole, mais quand il la prenait, cela pouvait être long. Valentina se blottit dans son poncho et posa sa tempe sur l'épaule de Luisa.
Il lui dit que l'important était d'être libre. Qu'en étant une fille, elle devrait se battre encore plus. Pour cela, elle ne devrait dépendre de personne, surtout pas d'un homme, d'un mari qui l'enfermerait entre ses griffes alors qu'elle serait beaucoup plus forte que lui. Qu'elle se fiche de ce qu'on dit d'elle et de ses choix, qu'elle cultive ses talents comme on affûte une arme. Libre, qu'elle se rappelle ça, libre de partir et de revenir. »
J'ai tourné la dernière page à regret, mais emplie de ce récit, de cette connexion à la nature, à la vie sauvage et libre… authentique!
« le travail, « là-haut», était ardu, périlleux, parfois traître, mais les arrieros étaient liés indéfectiblement à la Cordillère. Ils savaient aussi bien relever les défis d'un ciel enragé que rendre les armes face à elle. Taiseux, ils parlaient leur propre langage. Ceux qui n'étaient jamais montés, qui n'avaient jamais traversé les premières chaînes de montagnes, les habitants d'« en-bas » ne pouvaient comprendre. Les mots manquaient de couleurs, de sens et de splendeur, pour dépeindre la réalité de ce monde qu'ils avaient baptisé al interior, à l'intérieur. le monde des intrépides, à la source des crêtes. »
Merci
Delphine Grouès pour ce premier roman incomparable, d'une grande beauté et profondeur, mon véritable coup de ❤️ depuis le début de cette année! Tout simplement: merci 🌟