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Critique de thedoc


"La Disparition de Josef Mengele" , c'est le récit de la folle cavale de "L'Ange de la mort".
Josef Mengele, médecin et généticien sous le IIIe Reich, grand admirateur d'Hitler et fanatique de la pureté de la race aryenne, affecté à Auschwitz à partir de 1943, est l'un des nazis les plus tristement célèbres. Obsédé par ses recherches sur la gémellité mais aussi sur le nanisme et les personnes souffrant de déformations physiques, Auschwitz a été pour lui le plus fabuleux des laboratoires où les cobayes pullulaient. Ses expériences scientifiques toutes plus inhumaines et cruelles les unes que les autres ont fait de lui un des nazis les plus recherchés au monde. Comment cet homme a-t-il pu échapper à la justice pendant 34 ans ?

Olivier Guez a tout lu sur Mengele, a fait des recherches historiques et a enquêté pendant 3 ans, se rendant en Allemagne, en Argentine, au Paraguay et au Brésil sur les dernières traces du criminel de guerre. Ses investigations et sa plongée dans l'après-guerre, dans cette Amérique du Sud où les anciens nazis étaient accueillis à bras ouverts nous donnent ce roman -car il s'agit bien d'un roman - écrit dans un style âpre et dur. Argentine, Paraguay, Brésil... le lecteur marche dans les pas de cet homme inhumain et tout ce périple sud-américain m'a affolée.

Affolée de voir comment les nazis festoyaient dans l'immédiat après-guerre dans l'Argentine dorée de Peron qui rêvait de créer un 4e Reich sur les cendres de la guerre froide que se livraient les Etats-Unis et l'URSS. Dans les premiers temps, à Buenos Aires, capitale des rebuts de l'ordre noir déchu, Mengele est alors soigné aux petits oignons. C'est le temps du "Pacha".
Affolée de constater que le Mossad est souvent "à ça" de mettre la main sur Mengele mais que, conflit israëlo-arabe oblige, ses agents sont monopolisés sur d'autres fronts. Et donc tant pis pour Mengele.
Affolée de découvrir que les services secrets ouest-allemands infestés d'anciens nazis n'ont tout simplement rien fait avant les années 1980. Il fallait que cette génération de monstres disparaisse pour qu'un douloureux travail de mémoire officiel puisse commencer.
Affolée de voir combien Mengele a eu de soutiens : famille en premier lieu, amis, fonctionnaires... entretenu et souvent sauvé par l'argent qui coulait à flot de l'entreprise familiale bavaroise.

"La disparition de Josef Mengele" est vraiment une mine d'informations sur les dernières années du nazi. Un des premiers intérêts de ce livre, écrit sous forme de roman, est de combler les blancs qui jalonnent un documentaire, ces moments où - au-delà des faits historiques connus - l'on ne peut qu'imaginer les réactions ou sentiments d'un être ayant réellement existé. On peut ne pas être d'accord avec la part de fiction de Guez, avec les cauchemars de Mengele qu'il imagine de toutes pièces. Mais le résultat est là : le monstre est là, à portée de main. Il ne s'agit plus d'une figure historique impersonnelle mais d'un homme, dans tout ce qu'il a de plus inhumain. L'auteur s'est suffisamment documenté - il suffit de lire ses sources en fin d'ouvrage - sur le nazi pour que l'on soit sûr de la déchéance et de la chute de Mengele et pour que l'on se doute que des cauchemars devaient tarauder cet homme devenu paranoïaque et suspicieux, éternellement aux aguets, replié sur lui-même et maladif, bloqué dans une époque révolue et déchue.

On aurait tant aimé qu'il soit jugé pour ses crimes et que le bourreau fasse face à ses anciennes victimes. Mais ce n'était pas son destin. Alors on se contente de ce que Guez nous fait découvrir : un homme qui a cru se voir sorti d'affaires mais qui va vivre une vie de paria, rongé par l'angoisse jusqu'à la moelle, malade d'un climat et d'un pays qui ne sera jamais le sien. Et ça nous console. Car combien d'autres nazis sont morts tranquillement dans leur lit à plus de 90 ans ?
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