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Critique de michfred


Ce joli livre dormait sur mes étagères depuis quelques années...Une libraire - bonne fée me l'avait recommandé, un jour de pluie parisien, tout gris, sans rêve et sans musique, me promettant monts et merveilles ...

J'ai réveillé le bel endormi , et , comme dans les contes, son charme a agi : j'en suis sortie tout émerveillée.

Un joli sujet, une imagination débordante, une culture profonde et raffinée, un voyage dont je rêvais depuis longtemps, de la musique, de la musique avant toute chose...

Et une plume...enchantée !

Avec le talent de Hubert Haddad, dont je compte bien découvrir les autres facettes, j'ai découvert le Kérala où les hôtesses tamouls dessinent chaque matin, sur le seuil de leur maison, un merveilleux kolam de pigments colorés, cette "dentelle éphémère des trottoirs" qui augure si poétiquement du jour qui vient, se brouille avec les derniers pas, et s'efface au vent du soir.

Je suis entrée dans la synagogue bleue de Fort Cochin, où neuf vieux juifs de la diaspora en attendent un dixième pour le minyan , la grande prière, afin de convoquer tous leurs dons de conteurs pour raconter, une fois encore, à l'étranger nouveau venu, l'étonnante histoire vraie du royaume de Cochin où les Juifs de tout pays, fuyant pogroms et persécutions trouvèrent un refuge miraculeusement paisible et tolérant parmi les bouddhistes, les musulmans et les chrétiens de cet éden indien...

J'ai écouté les rumeurs de l'ouragan souffler sur les côtes de Malabar auquel s'opposait , fragile mais convaincu, le chant du hazzan bègue. La musique modale carnatique - sitar, tambour, luth arabe, bombarde et violon - m'a bercée de ses lentes mélopées hypnotiques, tandis que, dans la pension de Mâ, le piano de l'enfant monstrueuse du dieu Ganesh répondait au violon virtuose du vieil Hochea Mentzel.

Venu se perdre en Inde comme on se jette en un puits profond, Hochea Mentzel est seul, vieux, marqué douloureusement dans sa chair. Un attentat meurtrier lui a laissé l'âme détruite: le voici desormais sans plus d'espoir en l'homme, en rupture de ban avec cet eretz Israël qui avait été son havre après les déportations et l'horreur de l'holocauste, mais qui est à son tour devenu une terre d'intégrisme, de bruit et de fureur, où deux peuples ne peuvent plus fouler la même terre ni boire la même eau sans une haine féroce.

Mentzel n'imaginait pas trouver paix et tolérance au pays des castes et des intouchables.

Sans doute n'imaginait- il pas non plus y retrouver la passion de la musique, ni l'amour filial d'une jeune fille...

Un conte sensuel, une parabole apaisante sur la vieillesse, un voyage poétique et chamarré, auquel il est bon de s'abandonner, sans réserve, au son du sitar, dans les encens parfumés ..



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