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Critique de flag_


flag_
03 novembre 2018
Vincent Hein a vécu en Chine entre 2004 et 2016. Dans ce recueil de textes, qui se lit comme on boit des paroles, l'auteur de kwaï compile des notes qui courent de janvier 2005 à septembre 2008. Entre une arrivée en avion à 11700 mètres d'altitude et 970 kilomètres-heure et un retour en avion à 10800 mètres d'altitude et 960 kilomètres-heure.
Entre temps ? L'auteur y rencontre son épouse (Ma Xiaomeng), un beau-père en version originale non sous-titrée, perd son propre père, vit une escapade à Lhassa, vit les JO de Pékin de ce côté-ci de l'hémisphère, les événements du Tibet de ce côté-ci, l'emprisonnement de poètes subversifs ou opposants de ce côté-ci, est témoin de la censure de ce côté-ci, accompagne (et subit) des occidentaux et leur vision des choses de ce côté-ci...
Et l'auteur s'interroge, questionne le monde, aime, déteste (voire aime mais déteste à la fois), pèse le pour et le contre, Shanghai contre Pékin, ou l'inverse, s'amuse de la distance entre les choses et les gens, entre ici et chez soi. Participe, ou esquive, à la recherche d'authenticités, de traces de poésie banale, de maigres mais indispensables échappatoires loin de l'agitation perpétuelle. « Il est difficile d'écrire en Chine, de structurer son texte comme on pourrait le faire partout ailleurs. Tout est réellement surprenant, rocambolesque, indiscipliné, tout est si étrangement établi, tellement elliptique, que votre regard, vos sens tout entiers, sont sans cesse sollicités et qu'il n'est jamais aisé de concentrer son esprit sur une chose à la fois. On se perd en pensées, on s'égare, on rêve de fatras, et la forme littéraire qu'il convient le mieux reste sans doute leur poésie courte et vaporeuse, seule capable de coller à ce joli désordre. » Et – et ce sont sans doute les passages les plus intenses – doute, y compris de soi. « Comme elle [l'auteur Ella Maillart], je suis sans désir de retour, ne souhaitant que retenir ce que m'apportent ces journées un peu godardiennes, échevelées, et ce sentiment de ne plus être capable de concevoir ma vie autrement. »
Un ouvrage de deux cent pages d'une synthèse et d'une sincérité remarquable. Une tranche de vie en accéléré, et qui s'essaie à la retranscription d'une langueur. Un paradoxe autant qu'une prouesse. Et en guise de conclusion, une dernière note en fin de carnet, portant l'humilité au rang de philosophie.
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