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Critique de LaBiblidOnee


Bon 100 de boue Ah ! Je cherchais une lecture originale quand je suis tombée sur ce livre édité par Monsieur Toussaint-Louverture. Je me suis dit que c'était forcément une valeur sûre… Eh bien quelle migraine, mes amis ! Il a fallu s'y mettre à deux, avec mon mari, pour en voir le bout. En gros, on est dans un monde post-apocalyptique depuis tellement longtemps qu'on a oublié ce qui s'est réellement passé. Les peuplades semblent quasi primitives : Par incapacité à progresser de nouveau ou par peur de reproduire le passé ? Et cette peur, serait-elle entretenue par quelques-uns qui détiennent la mémoire, pour maintenir le nouveau monde tel qu'il est ? Comment font-ils pour dissuader la population de rechercher la vieille vérité enfouie ? Pourtant l'homme étant ce qu'il est, des rumeurs circulent encore sur le temps d'avant ; et si des spectacles « officiels » propagent la bonne parole, des légendes populaires se forment comme pour conserver l'amer moir… Seulement voilà, lorsqu'une civilisation périclite, le langage aussi, alors les concepts sont plus difficiles à appréhender, pour les personnages comme pour le lecteur… Car le narrateur est un enfant de 12 ans en quête de vérité et pour l'amer moir, il écrit son histoire… dans son jus.
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« A quoi bon la nuit c'est just du noir ça sert à rien quaux voyous qui voull nous taquet par sur prise et pillé nos prop piétés. Ils perdir l'amer moir de ce quété la nuit. Ils voulur just le jour toul tant et ils allé le fer avec les Chants Bardes. Ils avaient les N° du soleil et de la lune tout fracté et les fir gloutir par les machines. Ils dir : On vamettr tous les N° dans 1 Grand Boum et ce sera le N° des Chants Bardes. Ils bâtir l'Anneau des Nergies cest là où on voit le Cra Terre au jour d'hui. Ils déclenchèrent le Grand Boum et zoom parut un ganrr éclair de lumyer plus ganrr que le monde en tié et la nuit devint le jour. En suite tout dev nu noir. Rien que la nuit des années durant. Des pidémies oxir les genss ».
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Alors comme je suis une fille sympa, je vous la finis en bon François, mais si vous lisez ce livre vous n'aurez pas cette chance : il faudra lire en Parlenigme dans le texte (remerciez-moi, au départ j'avais écrit cette critique intégralement en Parlenigme) ! Un langage entre un babille d'enfant et un patois primitif. Faux couté tentif pour con prendre ce langage qui, pour reconstituer l'histoire, nous raconte des faits et légendes apparemment sans queue ni tête. Les personnages les analysent avec leurs moyens comme on tente d'interpréter la bible ou des textes anciens - et l'on voit à quel point on peut leur faire dire n'importe quoi, tout cela mêlé à la version officielle véhiculée par les spectacles de rue, la censure, et la transformation inhérente aux histoires transmises oralement durant des générations - autant dire le téléphone arabe.
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C'est une lecture pour ceux qui aiment les expériences, et dont l'esprit parvient à reformer rapidement les mots déformés. Ce n'est clairement pas mon cas : je butais à tous les mots, j'avais l'impression de ne pas avancer alors j'ai demandé à mon mari si je pouvais lire à voix haute : ça m'aidait à comprendre des associations phonétiques moins évidentes, mais l'Enigme Marchait toujours au ralenti. Alors Chou a proposé d'essayer à son tour, et finalement on a fini le livre comme ça : en lisant à voix haute à tour de rôle ! Mais le chemin de 300 pages vers la vérité est très long et tortueux ! D'un autre côté, lire trop vite en reconstituant les mots sans prendre le temps de regarder et d'analyser les mots qui les remplacent, c'est je pense amputer cette lecture d'une partie de son intérêt - et gâcher une grosse partie du travail du traducteur. En effet, les mots qui servent à en exprimer d'autres ne sont pas choisis au hasard, qu'il s'agisse de leur sens ou de leur sonorité. Il est donc intéressant parfois de ralentir et d'y prêter attention. Certaines associations phonétiques ou trouvailles lexicales sont particulièrement savoureuses.
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Le plus intéressant demeure que la forme sert évidemment le fond de l'histoire, c'est ce qui donne son sens au texte, et du sens à notre effort de lecture, sans quoi ce ne serait que pur masochisme.
En cela, Enig Marcheur est une oeuvre novatrice. Certains diront sans doute brillante. Mais sur le fond j'ai trouvé lassant que, ajouté au rythme de lecture ralenti par le langage, l'histoire tourne un peu en rond, sans aboutir à de grandes révélations. Et sur la forme, attention aux maux de tête : cela demande une énorme concentration car, même reconstitués, les mots racontent une histoire parfois obscure : ce sont des échanges entre gens issus de peuples revenus à l'âge de fer. J'ai pourtant l'expérience de ce genre de textes, moi qui ai adoré le bruit et la fureur (dont le récit débute dans la tête d'un handicapé mental), Des fleurs pour Algernon (où le récit débutait avec les mots et fautes d'une personne de faible QI), Acid Test (récit entièrement sous acide d'une série de very bad trip), etc… Mais là, vraiment, l'aventure est rude. Chou, m'a fait promettre de ne plus jamais acheter « ce genre de livre bizarre » - et sur le moment j'ai promis sans me faire prier ! Bon courage aux aventuriers du verbe !
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« J'étais bon en orthographe avant d'écrire ce livre ; ce n'est plus le cas maintenant ». (Russel HOBAN)
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