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Critique de BazaR


Comme quoi on en apprend tous les jours.

J'ai toujours cru que la profession de magicien vous valait systématiquement une situation sociale haut placée et respectable, une place de commandement. Mais voilà que Megan Lindholm alias Robin Hobb nous affirme le contraire : il existe une espèce de magiciens qui se cache dans les recoins sombres des grandes villes, et dont la situation sociale est facilement assimilable à celle des SDF et des clochards pour un oeil non exercé. Elle nous conte l'histoire d'un magicien qui répond au nom de… Magicien, et dont l'univers se limite à quelques quartiers de Seattle qu'il connait mieux que sa poche. Magicien a des dons évidents dont je ne vais pas faire la liste. Tout au plus vais-je dire qu'il a une affinité avec les pigeons (le titre original et d'ailleurs bien plus adapté est Wizard of the pigeons). Cependant il doit suivre des règles plutôt drastiques sous peine de… problèmes. Il se doit entre autres de passer pour un pékin moyen auprès des gens du commun. Discrétion avant tout. Il gère tranquille sa petite affaire dans cette ville qu'il adore, joue des rôles quelques peu mythomanes pour se gagner un café (il est fan de café) ou un bout de sandwich, aménage son petit squat, et surtout nourrit ses potes les pigeons.
Il n'est pas le seul magicien. Il y a Raspoutine le danseur, Euripide le musicien, et surtout Cassie leur chef d'orchestre. Cassie, c'est un peu l'Oracle de Matrix. Elle vous guide et vous engueule quand vous vous plantez.

Au début, Robin Hobb élabore une atmosphère légèrement imprégnée de magie positive et joue sur les contrastes en ajoutant une grise menace. Ça partait très bien.
Et puis elle est repartie dans un jeu qu'elle doit beaucoup aimer et qui m'a fait soupirer bruyamment en songeant « Et merde ! Elle recommence ». Je suis très loin d'avoir fait le tour de l'oeuvre de Robin Hobb – je n'ai lu que la première période de l'Assassin Royal – mais j'ai l'impression qu'elle adore appuyer sur les faiblesses de ces héros, et appuyer longuement, pour bien faire dégorger leur détresse (je pense à Fitz bien entendu). le Magicien voit sa belle routine se détraquer. Rien ne se passe comme attendu. le temps se met de la partie : froid, brume et pluie. Il se met à douter, perd sa confiance en lui-même, en ses pouvoirs. La clochardise le guette, lui qui vit toujours sur le palier juste au dessus.
Et les souvenirs reviennent, à coup de flashbacks. Sa vie passée, sa culpabilité, le traumatisme de la guerre. Des chapitres durant, c'est la descente aux Enfers, malgré ses potes magiciens qui ne parviennent pas à le remonter. Mais cette magie existe-t-elle ou n'est-elle qu'une illusion ? Robin Hobb maintient longuement cette atmosphère asphyxiante, à vous rendre claustrophobe. Comme pour Fitz, à chaque début de chapitre, je me disais « ça y est, il va remonter » et il descendait. Dur à lire, et cependant très bien écrit.

Les choses changent dans les derniers chapitres… comme dans l'Assassin (décidément). L'action d'un vrai roman de fantasy se déploie enfin. Tout est loin d'être expliqué. L'auteure laisse quelques indices par-ci, par-là, qui peuvent évoquer des liens… avec des légendes. Juste de quoi parfumer l'atmosphère et laisser l'imagination du lecteur s'envoler au dessus du tarmac que constitue le roman. J'apprécie beaucoup cela. La qualité des univers et les fins sont pour beaucoup dans le fait que je ne renonce pas à Robin Hobb, malgré son appétence pour les faiblesses des héros.

Le Dernier Magicien m'aura donné du mal sans jamais me décevoir vraiment. Il aura tout de même modifié mon regard sur une chose, au moins pour quelques temps : je regarde les pigeons avec plus d'affection qu'avant.
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