La guerre des bouffons

Un Juif, un Arabe (c'est quand ça m'arrange), un Chinois, un Kabyle et un Portugais qui sautent dans une forêt de couteaux et de haches pour sauver la vie d'un Antillais : c'est aussi ça, la banlieue.
C'est surtout ça.

Les Bondynois, plantés à onze kilomètres de Paris, pile au centre de la Seine-Saint-Denis, se considéraient comme le coeur vibrant du 93. Le nombre maudit de la société française, à en croire les journaux télévisés - ils dépeignaient le quotidien de nos agglomérations périurbaines comme à peine plus agréable à vivre qu'au fin fond d'une favela de Bogota.

Mon groupe apparaissait comme moins rebelle à l'autorité, moins relevé à la sauce samouraï du ghetto. Il était un poil plus représentatif de la diversité du peuple bondynois. Moitié pavillon, moitié cité, moitié chinois, moitié renoi : comme un arc-en-ciel courageux.

On évitait avec grand soin la maternité de Bondy quand on avait un peu d'ambition pour ses nourrissons. Délit de façade sans doute, l'établissement délabré étant bâti au bord des eaux vert fluo d'un canal pollué, où il pouvait vous pousser un bras dans le dos après une petite baignade.