AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Cannetille


Paul Raison est un haut fonctionnaire de l'État, au service de Bruno Juge, ministre de l'Économie et des Finances. En cette année 2026, la campagne présidentielle se déroule dans un climat incertain : une série d'attentats, non revendiqués mais manifestement coordonnés par un groupe d'une étonnante puissance technologique et financière, frappe des cibles apparemment sans lien de par le monde. Bientôt quinquagénaire, Paul doit par ailleurs composer avec une accumulation de graves problèmes personnels et familiaux.


Parvenu en ce qu'il aimerait considérer comme le mitan de son existence, Paul se retrouve en fait baigné dans une atmosphère crépusculaire. Sa lucidité désabusée lui fait appréhender un monde décadent au bord du précipice, tandis que sa sphère privée lui semble se résumer à un déprimant vide existentiel. Comment ne pas se sentir sombrer quand les perspectives ne cessent de s'assombrir, entre une société où l'on ne se reconnaît plus et le vieillissement qui grignote de plus en plus avidement l'avenir ? Les doutes de Paul sont l'occasion d'une peinture froidement pessimiste, pleine d'un cynisme aussi caustique que désespéré, de la société contemporaine et de ses dérives, entraînant une large réflexion sur ce qu'il reste de portes de sortie pour éviter de s'y anéantir. Une certaine résignation pousse notre homme à se replier sur son individualité pour trouver l'apaisement. Et tandis que, comme lui, chacun des personnages explore sa voie, entre spiritualité, engagement et famille, en s'y perdant parfois, c'est l'amour qui met tout le monde d'accord, en une série de tableaux d'autant plus lumineux qu'ils s'inscrivent en faux contre l'inanité fatale et absurde de la condition humaine.


Les sept-cent-trente pages de ce livre se parcourent avec plaisir et facilité, au gré des multiples facettes de la narration. Tout à la fois cyber thriller, satire sociétale et chronique familiale, Anéantir est une oeuvre protéiforme, où la profonde mélancolie de l'auteur face au destin d'anéantissement de l'homme, mais aussi de toute civilisation, trouve la rémission dans la célébration du bonheur d'aimer, seule valeur qui tienne dans cette vallée de larmes. de ce texte en clair-obscur, se détachent plusieurs magnifiques portraits de femmes, où elles paraissent, bien mieux que les hommes, savoir faire spontanément la part de l'essentiel. Pour parvenir aux mêmes priorités et enfin décrypter les messages freudiens des rêves qui ne cessent de le poursuivre, il aura fallu à Paul l'écrasant poids de l'impondérable. Seulement alors, avant qu'il ne soit définitivement trop tard, trouvera-t-il la force de se réconcilier avec sa mortelle, et peut-être pas si absurde, condition d'être humain.


Humour grinçant, mais aussi émotions, sont au rendez-vous de ce livre, qui, à partir de constats terriblement noirs et anxiogènes sur le monde contemporain, mène une analyse aussi juste que féroce, et trouve à se recentrer sur ce qui peut, malgré tout, préserver un sens à notre existence.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
Commenter  J’apprécie          867



Ont apprécié cette critique (82)voir plus




{* *}