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Critique de DonQuirano



Lors d'une séance de lecture à la prison de Fleury Mérogis, une prisonnière pose une question inattendue à Nancy Huston: "À quoi ça sert d'inventer des histoires alors que la réalité est déjà tellement incroyable? " Il faudra le temps d'une longue réflexion et l'écriture de cet ouvrage à Nancy Huston pour répondre à la question.

L'auteure commence par nous rappeler que nous sommes la seule espèce sur Terre qui tente d'associer un Sens à la vie et que "quand nous aurons disparu, ...il n'y aura plus de sens nulle part, qu'aucune larme ne sera versée sur notre absence, qu'aucune conclusion ne sera tirée quant à la signification de notre bref passage sur Terre, cette signification prendra fin avec nous puisque les animaux se contentent de la réalité». L'espèce humaine s'est depuis toujours inventé des fictions qui prennent forme dans les religions, les rituels, les tabous et les contes qui sculptent notre identité, source à partir de laquelle coulent le meilleur et le pire.

Les chapitres traitant des différents aspects de la fiction se succèdent avec un intérêt inégal pour amener le lecteur au dernier chapitre, plaidoyer sublime du rôle que la littérature joue dans nos vies, pour y répondre à la question posée par la pensionnaire de Fleury Mérogis.

Huston y défend l'idée que les conflits ne sont ni plus ni moins que le résultat de mauvaises fictions et que le roman nous aide à écouter la vraie musique du monde, nous apporte une vision de la vérité toujours mixte et impure, tissée de paradoxes, de questionnements et d'abîmes. Sa lecture kaléidoscopique nous permet de donner un autre point de vue sur nos réalités, de les décortiquer, d'en voir les ficelles, d'en critiquer les fictions sous-jacentes et de retourner dans notre réalité afin de la lire, elle aussi, avec plus de finesse et de discernement.

À l'heure où nos gouvernements occidentaux tentent de trouver des solutions face au terrorisme et que l'on voit monter les enchères des propositions sécuritaires qui ont pour résultat immédiat de rassurer la population, ils devraient songer à favoriser l'éducation et à promouvoir par tous les moyens possibles la traduction, la publication et la distribution des chefs-d'oeuvre de la littérature mondiale.

Février 2015
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