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Critique de Sando


Sando
23 novembre 2011
A 15 ans, Shim Chong n'a connu que la misère d'une vie faite de mendicité. Loin d'en vouloir à son père aveugle lorsqu'il la vend à des trafiquants chinois, elle se réjouit au contraire d'avoir pu lui apporter un tant soit peu de confort. Commence alors pour Shim Chong un long périple qui la conduira, toute sa vie durant, à traverser de nouvelles villes et de nouveaux pays, sans ne jamais vraiment s'attacher nulle part.
Rebaptisée Lenhwa, qui signifie « fleur de lotus » en chinois, par ses propriétaires, la jeune fille commence sa nouvelle vie en tant que concubine d'un vieillard impuissant âgé de 80 ans. Loin de souffrir de sa nouvelle condition, Lenhwa en profite pour tirer parti de la situation en apprenant le chinois et en s'ouvrant à la découverte des sens. A la mort du vieillard, elle comprend que sa présence dans la demeure n'a plus de sens et vend sa virginité à Guan, le fils de son maître, en échange d'une place au « Pavillon du bonheur et des plaisirs ». Devenue courtisane, la jeune femme emploie sa beauté, afin de devenir une grande séductrice, capable de dominer l'homme par l'envie qu'elle suscite en lui. de simple courtisane, elle devient alors Hwajia, « titre donné à la meilleure courtisane de la maison de plaisir » [cf : glossaire p.555]. En mettant ainsi son corps au service de son intelligence, Lenhwa gagne en popularité et en prestige. Sa rencontre avec Dongyu, un jeune saltimbanque, va donner un nouveau tournant à sa vie. Amoureux, les jeunes gens se marient à l'insu de tous et s'enfuient. Mais le malheur les rattrape rapidement et la jeune femme de 20 ans tombe à nouveau aux mains de trafiquants et se retrouve dans une sordide maison de passe : «Le vent du sud ». Loin de se laisser abattre, Lenhwa n'aura de cesse de s'élever au-dessus de sa condition, jusqu'à devenir la concubine d'un riche européen, puis l'épouse d'un prince.
Avec ce roman extrêmement dense, Hwang nous ouvre les portes d'une culture en pleine mutation, très ancrée dans un contexte historique. Certes, l'esclavage sexuel auquel sont condamnées tant de femmes est le sujet dominant du roman, néanmoins, il peint également le tableau d'une époque ravagée par la guerre de l'Opium, où les pays d'Extrême Orient luttent comme ils peuvent contre l'occidentalisation apportée par les Etats-Unis, la France, l'Angleterre et la Hollande. Il évoque également les guerres internes aux pays, les mouvements de révolution qui provoquent de douloureuses scissions au sein du peuple et le sanglant impérialisme du Japon.
Néanmoins, malgré ce contexte difficile, responsable de la plupart des drames qui touchent nos personnages, Shim Chong se détache avec luminosité de cette terrible fresque. Malgré un destin mouvementé, où elle se retrouve perpétuellement ballotée d'un lieu à un autre, cette femme déracinée garde un sang-froid et une maîtrise d'elle-même inébranlable. Si elle s'attache, jamais elle ne s'enchaîne à autrui. Voici le portrait fort d'une femme de tête, en quête de liberté, capable d'avancer sans jamais se retourner. On regretterait presque que Shim Chong ne recroise par certains personnages rencontrés tout au long de son chemin... En tout cas, j'ai beaucoup aimé ce roman grâce à la puissance dégagée par son héroïne et à la richesse de sa narration.
Un immense merci à Libfly et aux éditions Points de s'être associés et de m'avoir permis de faire cette magnifique découverte !
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