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Critique de Luxi


Luxi
20 septembre 2018
J'ai pleuré dès la troisième page. J'ai pleuré pour cette petite fille, cette petite Rachel Psankiewicz dans sa belle robe d'été, que la Rachel adulte prend par la main pour faire resurgir son histoire. Comme vous commencez à le savoir, la Seconde Guerre mondiale est mon sujet de prédilection et je pense qu'il n'y aura jamais trop de témoignages, de romans et d'essais sur cette monstrueuse période de l'Histoire.
"Nous étions seulement des enfants" est le récit d'une enfance perdue au milieu des prohibitions, des rafles et des camps : c'est ce qui le rend aussi beau, percutant, insupportable aussi. C'est un foyer empli d'amour que Rachel nous décrit, orné de mots yiddish et de chants polonais. Mais Hitler envahit la Pologne et la France déclare la guerre. Abram, le père de Rachel, est mobilisé.
Or Rachel est une enfant et ne comprend pas tout : alors elle tape du pied et résiste. Elle refuse de chanter en hommage au Maréchal auprès de ses camarades de classe. Elle hurle lorsque sa mère, Chana, entreprend de coudre une étoile sur son vêtement. "Je garde de ce jour une terrible sensation de honte, confie-t-elle. Pas d'être juive, mais de devoir l'être avant toutes les choses que j'étais, et d'en être différente des autres." Elle fuit, elle court de plus en plus vite, obstinément elle défend sa vie.
Nous suivons cette petite fille de la drôle de guerre jusqu'à l'arrivée des Américains. Il y a cette scène poignante, terrible, cette petite fille et sa cousine courant sous les avions et les tirs pour sauver leur vie, et c'est tellement incompréhensible, tellement barbare, tellement choquant. La guerre et l'enfance s'entrechoquent et c'est le ciel tout entier qui bascule devant ces deux univers qui n'auraient jamais dû se croiser.
Protégée par les étoiles qu'elle s'efforcera d'offrir à ses morts des années plus tard, Rachel échappe mille fois au pire. La première alerte à la bombe, l'exode, et puis cette fameuse rafle du 16 juillet 1942 : les policiers français qui entourent les deux soeurs, le magma grouillant dans les rues, et puis la gifle de la mère et cet ordre qui les sauvera: "Si on revient vous chercher, essayez toujours de fuir. Dans la rue, il y a du monde, ça vous protégera."
Contrairement à sa soeur, la Rachel d'aujourd'hui semble avoir fait la paix avec ses plaies. Elle a doucement décoré ses blessures de puissantes plaques dorées, "des étoiles qui brillent dans la nuit" pour ces milliers d'enfants interrompus de 39-45.
Présidente du comité Tlemcen, Rachel poursuit ses recherches, elle redonne des noms aux disparus, elle célèbre les abandonnés, les délaissés, les oubliés, elle redonne une voix aux absents. Ce témoignage pudique, raffiné et respectueux, m'a immensément émue. Il n'y a aucune haine dans la voix de Rachel, aucune rancoeur, aucun désir insidieux de vengeance ; cette femme n'est que clarté, don d'elle-même et sagesse éblouissante.
C'est un récit sur l'enfance que la guerre cogne, fracture et vieillit. C'est un récit sur l'entraide, l'audace, le courage niché en soi. Mais c'est également un récit sur la bienveillance, l'amitié et le pardon. Un grand merci à NetGalley et aux éditions Fayard pour cette magnifique lecture.
Lien : https://luxandherbooks.wordp..
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