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Critique de Myriam3


Honorée Fanon Jeffers trace sur 250 ans la généalogie des ancêtres de la jeune Ailey, étudiante afro américaine qui a passé toutes ses vacances sur l'ancienne plantation où ses ancêtres étaient esclaves. C'est une fresque incroyable du sud des Etats-Unis, la Georgie plus particulièrement, à travers la vie du tout premier, Micco, fils d'un colon écossais et d'une mère creek dont le père était noir, de ses descendants et des descendants de Samuel Pinchard, colon installé sur le site vers 1800.
A partir de leur rencontre, les deux lignées ne cessent de s'entrechevêtrer, de mêler leur sang par le mariage mais aussi les viols répétés. Ailey descend de la branche noire et illégitime. Cordelia, de la branche blanche et légitime, ne soupçonnant pas à quel point elle est proche, finalement, d'Ailey.
Par cette fresque de 900 pages, l'auteure nous dessine le parcours du peuple afro-américain de l'époque de l'escalavage à nos jours, révélant comme je ne l'avais jamais lu à quel point ce passé fait de souffrances et d'humiliations est encore présent dans le moindre recoin de la vie actuelle, des universités où ils doivent se battre toujours deux fois plus, au risque accru de tomber dans la drogue et la violence, sans parler d'un sexisme à peine caché au sein de la population.
Les problèmes actuels entre populations noire et blanche dans le sud s'explique clairement par ce passé encore très frais, cette animosité venue de deux siècles d'histoire contre laquelle aucune remediation n'a jamais été proposée, aucun vrai plan de paix.
Ailey est une fille de caractère, petite dernière et enfant gâtée, forte et brillante avec ça. Et malgré tout, elle finit à un moment par tomber sous le poids du passé, avant de décider d'en fouiller les secrets.
Ce n'est pourtant pas sa vie qui m'a le plus intéressée même si je pense avoir mieux compris, plus en profondeur, le quotidien d'une famille afro américaine dans le sud, mais les récits de de ses ancêtres au fil des décennies, chacun ou plutôt chacune se voyant réserver un chapitre en alternance: cette période avant l'arrivée des colons, dans un paysage encore très sauvage, jusqu'à l'horreur insoutenable des violences subies dans les plantations, la fin de l'esclavage auquel succède les lynchages et la fondation du Ku Klux Klan. et la place de la femme, doublement opprimées, doublement moins égale.
J'ai littéralement dévoré ce gros pavé que je n'arrivais pas à lâcher, m'attachant au grand-oncle Root qui traverse le siècle et est la dernière connexion entre les derniers esclaves et Ailey. J'ai trouvé celle-ci parfois cruelle, égoïste, et j'ai regretté que dans toute la famille, la seule qui finalement s'en sort absolument toute seule, devenant médecin et vivant discrètement son homosexualité, la soeur intermédiaire Coco, soit si violemment mise de côté à la fin du récit. J'aurais espéré qu'un chapitre lui soit accordée à elle aussi, il y aurait eu beaucoup à dire...
L'autrice, connue pour ses poésies, dit ne pas vouloir réitérer l'exploit. Mais sans doute y a t'elle absolument tout mis, tant c'est dense!
Merci Babelio et Les escales, je conseille vivement ce roman bouleversant.
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