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Critique de Hedrankopaline


Une fresque, un étalage.


Mixtli le personnage principal a tout vu tout fait. Je dirais même trop fait. Au bout de plus de mille pages en sa compagnie, de sa jeunesse à l'infirmité, on en apprend beaucoup sur la vie de certaines civilisations précolombiennes… et aussi sur les fantasmes de l'écrivain.


Le personnage principal est myope et le monde il le verra à travers un prisme qui semble réduire ses centres d'intérêts à la fornication et à la réussite personnelle. C'est en tout cas l'impression qu'il m'a laissé une fois le livre refermé. Il aurait aussi bien pu porter des oeillères. L'auteur lui facilite la tâche. Ce qui n'est pas encore le Mexique devient le terreau de diverses fantaisies sexuelles qui déboulent dans l'histoire à un moment ou à un autre. Alors, croiser une ou deux paires de fesses en passant, pour marquer le coup, on va dire que c'est pour pimenter l'histoire ou toucher le fond de l'horreur selon le destin de ces arrière-trains. Au fil des lignes qui décrivent tout pareillement relations sexuelles conventionnelles, viols et autres perversions, on sent toujours une certaine fascination, une certaine complaisance dont les descriptions détaillées et récurrentes sont significatives. Là, on se dit qu'Azteca devient un exutoire un peu malsain.


Et un catalogue de faits où le héros ( soit disant presque malgré lui ) se trouve embarqué pour le meilleur et pour le pire. Souvent il n'y a pas de juste milieu dans Azteca. J'aurais préféré une palette de plusieurs personnages qui auraient pu ajouter leurs couleurs à ce tableau mésoaméricain avec plus de crédibilité. Peut-être est-ce pour cela que Mixtli alias Nuage Noir, ingénieux scribe et guerrier décoré et riche marchand et seigneur avisé ne m'a pas touché plus que cela. Il n'est somme toute qu'un vecteur pour les marottes libidineuses de son écrivain et pour en apprendre plus sur ces cultures avant l'arrivée espagnole.


A ce sujet, il n'est guère aisé de savoir où est la vérité dans ce flou véridico-romancé. Que quelqu'un me corrige si je me trompe, mais il ne me semble pas que les Aztèques, contrairement à ce qui est montré dans le roman, aient un jour eu une science de l'écriture suffisamment poussée pour servir à autre chose qu'à l'enregistrement d'affaires gouvernementales ou des récits mythologiques, en bref des événements solennels, codifiés. A la différence des Mayas qui sont ici présentés comme de gentils benêts, rejetons d'une grande civilisation disparue regroupés dans leurs taudis. Or, bien que déclinante par rapports aux Cités-Etats de jadis, il existait encore une culture Maya active, des villes et tout le toutim. Sans parler des Tarasques ( Purepechas ) qui sont décrits comme des individus licencieux et des pédophiles assumés. Peut-être s'agit-il de ficelles scénaristiques. Ou bien rien de plus que l'état des connaissances au moment où l'auteur fit ses recherches pour construire son roman. Mais aucune source n'est citée, aucune bibliographie donnée en fin d'ouvrage. On nous dit que c'était un homme de terrain, j'aurais bien aimé suivre son parcours. Toutefois, je pense avoir lu plus de vrai que de faux même si le livre est encore très controversé. C'est justement l'énergie investie par l'auteur pour être juste ( géographiquement, historiquement, jusque dans les termes nahuatl ) qui fait sauter aux yeux les accrocs dans la tapisserie quand Jennings prend le parti pris injustifié d'accréditer certaines rumeurs sur les moeurs des ces peuples plutôt que d'en rester aux faits déjà fournis. Surtout que la plupart des errances sexuelles de l'auteur se passe sous couvert de différences culturelles erronées et c'est vraiment regrettable pour ce type d'ouvrage. Des précisions auraient été bienvenues pour démêler la fiction du réel en fin de livre avec le lexique.


Alors, malgré ces points qu'il serait fastidieux de relater, l'histoire m'a tout de même beaucoup intéressée. Sans doute parce que je cherche toujours à en apprendre plus sur l'Histoire de ces peuples natifs. Je suis biaisée et en même temps plus exigeante. J'ai trouvé le style descriptif de l'auteur très agréable à lire. Gary Jennings est un excellent conteur. Les nombreuses pages sont passées assez vite sans m'ennuyer. Il sait placer ses évènements, les souvenirs d'enfance, les batailles, les regrets et les faire vivre de sa plume. Ce n'est pas chose aisée de rendre le passé vivant, d'alterner la comédie, les atrocités, qui se rejoignent parfois dans un grotesque sanguinolent, les moments de contemplation, et bien d'autres choses encore et d'en ressortir avec un ensemble cohérent.


En tout cas, Azteca m'aura fait voir du pays.
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