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Critique de Pecosa


Pecosa
12 septembre 2013
"Oh Dieu! Après ce que tu nous as fait tu mérites d'être pendu!", s'écrie Teresa Groismann après la mort de son fils, et elle décide de devenir goy. L'arrière-grand-mère de Jodorowsky rompt avec la tradition familiale et c'est ainsi que commence l'épopée des siens, cet extraordinaire voyage à travers l'Europe et au-delà des mers.
Le titre original du roman est "Donde mejor canta un pájaro", inspiré d'une citation de Jean Cocteau, "Un oiseau chante d'autant mieux qu'il chante dans son arbre généalogique". Alejandro Jodorowsky le dit dans le prologue, notre arbre généalogique "constitue un trésor qui renferme l'essentiel de nos valeurs". Le Chilien est un peu comme Tristram Shandy, le gentilhomme de Sterne. Le récit de son existence passe par celle des siens, par l'évocation de toutes les branches de son arbre, les Levi, les Arcavi, les Prullansky, une famille nombreuse mue par la passion.
Jodorowsky apparaît bien ça et là, présidant à sa propre gestation: "Lorsque j'ai constaté que les ovaires de ma mère étaient en période de fécondité, je leur ai donné l'ordre de s'accoupler (...) Pendant les mois qui ont suivi, j'ai poussé tranquillement. Ayant réussi à réunir les géniteurs de mon choix, je me suis livré à la sagesse des cellules: elles possédaient la connaissance millénaire pour me former." Mais ce sont les souffrances et les apprentissages de ses ancêtres qui ont fait de lui un citoyen chilien.
De l'Ukraine aux rives de la Méditerranée, du Chili à l'Argentine, les aïeux de Jodorowsky se font dompteurs de puces, liseurs de tarots dans les yeux des fauves, syndicalistes...laissant le lecteur désarçonné mais enthousiaste, avec l'impression que les histoires de shtetl de Bashevis Singer ou de Hilsenrath ( celui du Retour au pays de Jossel Wassermann) se laissent emporter par le tourbillon du réalisme magique des grands auteurs latino-américains. Jodorowsky est un merveilleux conteur, et cette oeuvre hybride, transcendée par la puissance de son écriture, magnifiée par la tradition orale, fait de l'histoire familiale une légende empreinte d'un syncrétisme mystique, qui revendique le droit au bonheur et au plaisir. Il est des livres qui vous coupent du monde et vous font passer une nuit blanche. L'arbre du dieu pendu est de ceux-là.
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