AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Alfaric


Cette anthologie est le premier tome d'une série appelée "Black Wings of Cthulhu" en VO, où Sunand Tryambak Joshi spécialiste mondial des univers lovecraftiens réunit des « contes d'horreur lovecraftiens », qui je suis obligé de le signaler tiennent plus du panorama de l'horreur contemporaine que de l'hommage à l'homme qui a révolutionné le genre horrifique au XXe siècle.
Je ne suis pas très nouvelles à la base et il y a forcément à boire et à manger dans un recueil, mais je trouve quand même dommage que l'immense majorité d'entre elles soient écrites à la première personne, car c'est lassant à la longue d'enchaîner autant de jeux autour du je... Après je ne suis pas d'accord avec l'anthologiste qui en tant qu'auteur a une vision linéaire du genre alors que les lecteurs en on une vision spiralaire : on pose toujours les mêmes questions, mais on y apporte des réponses différentes avec le temps et l'expérience... Oui il faut s'adapter à son temps et traiter de préoccupations de notre époque avec le langage de notre époque, mais tout ne qui appartient au passé n'est pas forcément dépassé et à oublier ! (surtout avec le genre fantastico-horrifique qui est très primal : les fantômes, les lycanthropes, les vampires, les serial-killers et les animaux tueurs ne sont pas has been quand ils ne sont pas maltraités par des tâcherons sans imagination, car c'est les vieux pots qu'on fait les meilleures confitures ^^)


Caitlin R. Kiernan, "L'Autre Modèle de Pickman (1929)" :
Les jeux littéraires postmodernes m'ont fait peur au début (avant de me faire rire ^^), mais on transpose joliment la nouvelle d'origine du monde de la peinture au monde du cinéma, de tellement bonne manière d'ailleurs que relier ce récit à celui du Maître de Providence n'était pas nécessaire. C'est simple, c'est efficace, on est bien dans le sujet et ici c'est une bonne idée d'avoir commencer le recueil par cette nouvelle bien stylée. L'auteure a vraiment du talent, il faudra donc que croise ses écrits à nouveau...


Donald R. Burleson, "Rêves de Désert" :
De nos jours un jeune homme de Providence fait des rêves de désert, et en décrivant ses visions au professeur Armijo il parvient à identifier les paysages de l'Arizona. Il part en pèlerinage sur le lieu des ses visions, et parvient de justesse à échapper à la gueule grand ouverte d'une horreur cosmique...
Une véritable nouvelle lovecraftienne, mais tellement proche de l'originale qu'elle ne parvient pas trop à dépasser le stade du pastiche. Mais bon heureusement qu'elle est là pour la caution du Maître de Providence, parce que c'est loin d'être le cas de toutes les nouvelles de ce recueil...


Joseph S. Pulver, Sr, "Marques" :
Le convoyeur dénommé Johnny doit amener un mystérieux colis à son employeur M. Phoenix, sauf que celui-ci pratique la magie noire, qu'il est prophète des Grands Anciens et que les astres sont propices. On est dans le style hard-boiled assez cool, et on n'est pas très loin d'une version courte et grimdark d'"Angel Heart" ^^


Michael Shea, "Deal de calmar" :
Entre délinquance et délabrement urbain à San Francisco, on suit les élucubrations du petit voyou Andre qui a besoin d'argent payé au prix du sang et d'un « témoin » pour son « élévation ». Intrigué par sa folie, le caissier Ricky Deuce l'accompagne pour jouer le rôle de témoin et découvre ainsi l'univers des Grands Anciens.... Désormais convaincu des mystères du cosmos, il décide de suivre le même chemin et part à la recherche des mêmes ingrédients que le barjot Andre qui n'est plus humain ou qui n'est plus vivant… le ton est plutôt léger avant les révélations horrifiques, et cette nouvelle est plus proche des univers de Clive Barker que de ceux de Lovecraft...


Sam Gafford, "Esprit de passage" :
Michael a un tumeur au cerveau, les hallucinations se multiplient et Lovecraft et ses créations se mettent à intervenir dans sa vie et à interagir avec lui. Si le sujet n'était pas si terrible, je dirais que l'écriture est très drôle car l'auteur multiplie références à la pop culture et critiques au vitriol de la société ultralibéral que nous subissons tous au quotidien (vous savez, celle au il faut avoir la santé car sinon il faut être riche pour être bien soigné : Monde de Merde !). de Lovecraft et de ses créatures rien ne fait peur à Michael, car l'horreur c'est le cancer qui est dans sa tête et qui le ronge physiquement et mentalement, et qui réduit son espérance de vie à quelques mois qu'il passera dans la douleur : c'est ainsi que nous suivons sa fin de vie et son grand saut vers l'oubli..


Laird Barron, "Le Broadsword" :
Un joyeux mélange de Stephen King, Clive Barker et Graham Masterton. le manoir hanté version société de consommation où les jeunes vandales qui pourrissent la vie des pensionnaires s'avèrent être des vampires psychiques interdimensionnels... Il se passent de drôle de choses, les résidents ne cessent de les signaler aux autorités qui en ont rien à secouer, pour certains c'est forcément un coup du gouvernement et on se met à traquer caméras et micros tandis que le narrateur Pershing qui commence à dormir le jour pour veiller la nuit suscite de plus en plus l'inquiétude chez ses proches...
C'est barré, c'est baroque, plein d'humour noir et de critique de la société. Malheureusement l'auteur réalise en moins de 50 pages la synthèse de "Ça" et des "Tommyknockers" et donc la chute qui aurait pu être horriblement réussie est un peu confuse, car après être parti dans tous les sens il a bien fallu que le récit retombe sur ses pieds... J'aimerais bien savoir ce dont l'auteur est capable en roman !


William Browning Spencer, "Usurpation" :
On dirait un épisode d'"X-Files"... Brad et Meta voyagent sur une route déserte du côté d'El Paso, ils sont attaqués par un essaim de guêpe chelou et c'est l'accident... Aucune trace de piqûres et aucune trace desdits insectes, et le Fox Mulder local explique à Brad que cela arrive souvent dans le coin et que c'est la preuve de l'existence d'une colonie alien dans les montagnes. Meta comme Dana Scully guérit miraculeusement de son cancer, mais elle se met à avoir un comportement étrange. Quand elle disparaît, il est persuadé que les aliens l'ont enlevée et il se précipite vers le lieu signalé par le Fox Mulder local sauf que... SPOILER ! Sympa, mais cela ne vaut pas "Delta Green" ^^


David J. Schow, "Le livre de Denker" :
Denker connaît la fortune et la gloire avec une machine à miracles, sauf qu'il s'agit d'un charlatan puisqu'il n'y nulle science là-dedans mais le Necronomicon (qui n'est pas nommé d'ailleurs ^^). Une petite pochade à l'humour absurde que n'aurait pas renié ce bon vieux Terry Pratchett, qui permet de faire une pause bienvenue dans ce recueil fantastico-horrifique...


W.H. Pugmire, "Les Habitants de Wraithwood" :
Le jeune délinquant Hank est en cavale après avoir déconné une fois de plus, et il trouve asile dans un hôtel-bar clandestin du temps de la Prohibition (syndrome "Psychose" ? ^^). Sauf que le lieu tient de l'hôpital psychiatrique avec une ribambelle de cosplayers freaks qui de jour en jour ne recule devant rien pour ressembler aux détournements gothiques des tableaux de maîtres trônant dans leurs chambres... D'ailleurs celui de la chambre d'Hank est un tableau du tristement célèbre Richard Pickman... Une variation vénéneuse voire glauque du "Portait de Dorian" Gray, en compagnie des créations de Caspar David Friedrich, Léonard de Vinci, Füssli, John Everett Millais, Oskar Kokoschka, Gutav Klimt, le Titien, Edward Burne-Jones, Dante Gabriel Rossetti, Goya...


Mollie L. Burleson, "Le Dôme" :
Au Nouveau-Mexique (encore ? Je sais bien que l'Etat ensoleillé est le lieu de villégiature de pléthore d'écrivains américains mais quand même hein), Tom est intrigué par la brocante abritée par le bâtiment dénommé le dôme où le propriétaire surveille constamment l'oeil au centre de la coupole... Un jour il pense voir à travers l'oeil un autre monde et une créature tentant de venir dans le notre, il crie et il s'enfuit... On ne retrouvera jamais le propriétaire... Mouais, c'est beaucoup succinct pour en tirer véritablement quelque chose !


Nicholas Royle, "Rotterdam" :
Un technicien est en repérage à Rotterdam pour adaptation de "Le Molosse" de Lovecraft. Son patron le retrouve se place, ils boivent beaucoup et apparemment il finit par le trucider. Avec sang froid il se débarrasse du corps, de l'arme du crime et des traces du délit : serial killer ou schizophrène ? Fin !
Une des nouvelles favorites de l'anthologiste semble-t-il, mais il n'y a rien de lovecraftien là-dedans et c'est un des récits les moins réussi du recueil : aussitôt lu aussitôt oublié !!!


Jonathan Thomas, "Tentante Providence" :
Justin un artiste de Providence qui a connu son petit succès avec ses photographies dénonçant l'agonie de la ville ville défigurée et mutilée par la gentrification qui multiplie les immeubles de bureau, les banques, les assurances et les boutiques de smartphones sans âme toutes tous interchangeables... Il a croisé une nuit le fantôme d'HPL, et tente désespérément de renouveler l'expérience en trouvant quels facteurs lui ont permis de se connecter avec les mânes du Maître de Providence... de fil en aiguille il se prend le chou avec son supérieur hiérarchique, le médiatique et carriériste professeur Palazzo, et lors d'une prise de bec ils tombent tous les deux dans un trou du monde : seul l'un d'entre eux échappera aux créatures qui l'habitent ^^
Il y avait de l'idée, mais la fin n'est pas très bien gérée (j'ai dû la relire plusieurs fois tellement j'avais l'impression qu'il manquait des pages pour suivre l'enchaînement des faits et leur résolution)


Darrell Schweitzer, "Hurlements dans la nuit" :
Transfiction postmoderne : on ne sait pas de qui ça parle et ce que cela raconte, pas de début, pas de fin et une écriture impressionniste... Apparemment on serait avec un individu perturbé qui aime l'obscurité et les créatures qui la peuple et qui lui parlent, il y aurait eu des actes de violence, il passe par l'Hôpital Psychiatrique et fait profil bas pendants des années avant que tout ne recommence et qu'il passe du côté de la nuit... A oublier voire à zapper !


Brian Stableford, "La Vérité sur Pickman" :
Le région reculée de l'Île de Wight, une vieille maison coloniale isolée du reste de la population, des tunnels sombres et humides, une ambiance vénéneuse digne de "Moonfleet" ou d'un Alfred Hitchcock de la bonne époque, et une masquerade c'est-à-dire une para-humanité cachée... On attend le twist thriller, on attend le chute horrifique et le sad end amenant le triomphe des forces de la nuit, mais la véritable horreur est bien plus intime que cela... Ah bravo Monsieur Brian Stableford ! On commence par passer à la moulinette tout l'héritage lovecraftien et on finit par amener l'horreur par là où on ne l'attendait pas... le professeur américain Thurber enquête sur le cas Pickman et la vague de folie qui frappa Boston dans les Années Folles, et il voyage jusqu'au trou perdu anglaise de où habite le dénommé le petit-fils de Silas Eliot pour lui racheter un tableau méconnu de l'artiste maudit qui était sans doute aussi inhumain que ces modèles. Ce dernier connaît la vérité, et il voudrait bien que le professeur ne l'apprenne pas et ne la dévoile pas au grand jour, car il a deviné est que le chercheur cherche un échantillon ADN de l'artiste dégénéré pour en démontrer l'inhumanité. Il y a donc de bons dialogues au chacun joue au chat et à la souris dans une parti de » je sais que tu sais que je sais que tu sais », sauf que...
L'auteur touche-à tout est exégète, anthologiste, éditeur, grand spécialiste de la littérature française et grand connaisseur de la Science-Fiction (il travaillerait en France, il serait sans doute chez ActuSF ! ^^)... C'est donc tout naturellement qu'il aborde le fantastique par l'angle scientifique : génétiques, allèles récessives, facteurs mutagènes, et en réfléchissant sur l'inné et l'acquis on aborde la question des folies collectives dans l'histoire (comme l'Affaire de Hautefaye, où le dénommé Alain Monéys a été lynché, brûlé et dévoré par les habitants du village le 16 août 1870 : que voilà un fait divers qui pourrait inspirer des émules français du Maître de Providence !). Dans tous les cas j'en aurais sacrément appris sur la syphilis et les toutes dernières théories sur cette sombre maladie...


Philip Haldeman, "Tunnels" :
Le jeune David fait de plus en plus souvent d'horribles rêves de créatures fouisseuses remontant vers la surface, au point d'hésiter à descendre en dessous du troisième étage de son immeuble... Pour son grand-père c'est le signe qu'Ils les ont retrouvé, et que les astres Leur seront bientôt propices, pour ses parents tout cela n'est que fantasques élucubrations... Mais Murphy sait : des immigrants exploités, des ouvriers souvent en danger sur les chantiers du métro new-yorkais, et au coeur des ténèbres l'horrible rencontre avec des vers géants télépathes... Pour se protéger les survivants se sont regroupés, mais Ils ont remonté leur piste et que faire face à un tremblement de terre localisé à leur seul immeuble ?
Un récit peut-être plus proche du Brian Lumley lovecraftien que que Lovecraft lui-même, mais un non récit quand même !


"La correspondance de Cameron Thaddeus Nash, Annotations de Ramsey Campbell" :
Le spécialiste de Lovecraft invente le personnage fictif de Cameron Thaddeus Nash, fanboy de Lovecraft qui passe de lettre en lettre l'admiration absolue à l'exécration absolue envers son idole... Complètement parano il est développe un délire de persécution, persuadé qu'il est un génie de la littérature fantastique et que tout le monde veut le plagier et/ou l'empêcher d'être publié car le reste de la production souffrirait trop de la comparaison. Il est aussi victime du la peste élitiste, et il finit par être persuadé également que le monde ne le mérite, car il ne fait pas de la littérature de l'imaginaire mais de la littérature du réel... A ce stade de son délire il se transforme en « reclus de Providence » tel que certains imaginait Lovecraft, et persuader que tout le mythe que ce dernier a inventé est la réalité : il décrit ses voyages psychiques à travers l'univers infini, ses rencontres et ses conversations avec des créatures cosmiques inconnues des humains et la manière donc celles-ci le transforme peu à peu en quelque chose d'autre...
C'est truffé de références, relevant parfois de l'érudition voire de l'exégèse, mais la fausse note du canular vient que la manière de s'exprimer de Cameron Thaddeus Nash est beaucoup trop moderne pour appartenir aux Années Folles ^^


Michael Cisco, "Violence est fille de confiance" :
Transfiction postmoderne : on ne sait pas de qui ça parle et ce que cela raconte, pas de début, pas de fin et une écriture impressionniste... Apparemment on serait avec des cultistes rednecks avec une ambiance de torture porn, donc on serait dans un massacre à la tronçonneuse lovecraftien vu du côté des bourreaux... A oublier voire à zapper !


Norman Partridge, "Démons mineurs" :
Très bonne nouvelle où se télescope les univers de Lovecraft et de Frank Miller (remember "Sin City" ^^). Les astres ont été propices et des créatures de cauchemar déboulent de tout partout en même temps : le shérif John Dalton et son adjoint Roy Barnes doivent faire face à l'apocalypse et se transforment en chasseurs d'horreur... Roy pense qu'il y a un lien entre ce qu'il se passe et les vieux livres qu'il ont trouvé dans le coffre d'un étrange suspect décédé le jour où tout a commencé, quand un monstre sorti d'on ne sait où s'est mis à dévorer les ouvriers d'un chantier. Roy est tout près de la vérité, mais John en a rien à secouer, et quand les militaires commencerons à tout nettoyer il se gardera bien de leur révéler ce qu'ils sait... On reprend pas mal de codes de l'apocalypse zombie à la George A. Romero, mais ici les morts-vivants sont remplacés par les créatures du mythe : ça ferait un bon film !


Adam Niswander, "Histoire surnaturelle" :
On dirait un épisode des "Contes de la crypte" et on suit la transformation en protoplasme pensant de l'employé de bureau dénommé Thompson, racontée de l'intérieur par la narration à la première personne. Original certes, mais pas génial pour autant.


Michael Marshall Smith, "Substitution" :
Une transfiction veggan ? Le narrateur surveillé par sa femme Helen un bobo banlieusard adepte du mourir en bonne santé : on mange bio et light, donc pas de sucre, pas de sel, pas de gras, 5 fruits et légumes par jour et surtout pas de viandes empoisonnées par les toxines (mais il s'enfile en cachette de sa femme des sandwichs au corned beef et au raifort ^^). Bien sûr il se fait livrer toutes ses courses à domicile parce que le temps c'est de l'argent (et puis c'est aussi à la mode dans sa classe sociale de commander en ligne sur son blackberry, on ne pas va quand même pas se déplacer et devoir côtoyer les classes nombreuses donc dangereuses ?). Un jour il y a substitution dans les commandes avec arrivée surprise de steaks juteux et charcuterie italienne, et le mari se met martel en tête de découvrir avec qui les commande ont été interverties... Après avoir découvert qu'il s'agissait d'une femme célibataire, il se met à fantasmer sur elle avant d'agir en vrai stalker, sauf qu'à sa première séance de voyeurisme il découvre qu'elle mange de la viande crue... Effroi et horreur... Mdr on dirait un "Chair de poule" à la sauce Stephen King !


Jason Van Hollander, "Susie" :
La mère de Lovecraft est au sanatorium, elle se prend pour Shub-Niggurath (à moins qu'elle ne soit le vaisseau de Shub-Niggurath ^^) et pense à son fils, prophète des Grands Anciens qui doit attendre que les astres soit propices pour tous les délivrer de leur éternité... Il y a de l'idée, l'auteur ayant bien bourlingué dans le genre fantastico-horrifique mais la nouvelle est trop courte pour vraiment en tirer quelque chose... C'est dommage !


Challenge défis de l'imaginaire (SFFF) 2018
Commenter  J’apprécie          353



Ont apprécié cette critique (34)voir plus




{* *}