AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de mumuboc


J'ai découvert Gaëlle Josse l'année dernière, au hasard d'une lecture (Le dernier Gardien d'Ellis Island) et depuis je lis tous ses romans avec un plaisir immense, jamais déçu et je parle beaucoup autour de moi de cette auteure si discrète.

Janvier 2018 : nouveau roman..... je me précipite dessus bien sûr : que nous a-t-elle réservé, où va-t-elle nous embarquer ? Et bien me voici sur la côte bretonne, battue par les vents, dans les années 50, le pays vient de sortir de la guerre et se remet tout doucement de ces années d'épreuve. Anne l'héroïne, la principale narratrice, après une période difficile avec la perte de son premier mari pendant le conflit, pense avoir trouvé un peu de stabilité, de confort pour elle et son fils Louis auprès d'Etienne, le pharmacien du village. Mais Louis va disparaître et une longue attente va commencer pour elle, partagée entre l'amour maternel et l'amour pour son mari.

Je ne suis qu'une déchirure. (p79)

Comme pour les fois précédentes, un court roman mais tellement riche, direct, précis, sans broderies inutiles.

Tous les jours je dois m'inventer de  nouvelles résolutions, des choses pour tenir debout, pour ne pas me noyer, pour me réchauffer, pour écarter les lianes de chagrin qui menacent de m'étrangler.(p82)

Le thème est l'attente, insoutenable, difficile, le manque de l'absent et pour le retrouver elle hante les lieux qu'ils ont partagés, eux, tous les deux, seuls avec leur misère mais heureux d'être ensemble et de leur vie simple, où le moindre objet a une histoire, est un souvenir.

 Bien sûr elle aime l'homme qui partage sa vie mais d'un autre amour et puis il y a le déchirement lorsqu'il provoque le départ de Louis. Elle évoque leur vie, son changement de statut dans le village, elle, la veuve remariée au plus beau parti, elle dont l'enfance n'a pas été douce, elle que la vie a malmenée.

Je me demande pourquoi il m'aime tant, et ce qu'il peut bien trouver à une femme comme moi, habitée d'absents, cousue d'attentes, de cauchemars et de désirs impossibles.(p106)

Anne, elle, a ses solutions pour tromper l'attente, sa petite maison, son antre,  ses lettres à Louis, là où il peut être, pour lui parler du jour de son retour et de la grande fête et du repas qu'elle prépare, car il reviendra, elle ne sait pas quand, elle espère, elle, la douce Anne mais qui guette comme une bête le retour de son petit.

De courtes phrases qui se précipitent parfois comme lorsqu'on est sur le fil du rasoir, que l'esprit galope, se perd, tente de comprendre mais surtout quand il est submergé par l'angoisse. 

Et puis toujours avec Gaëlle Josse, une pirouette, un emballement et comme dans ses précédents récits on est fauché, déstabilisé. Il ne faut s'attendre à rien avec elle car c'est elle qui décide du moment, du lieu, de la manière.

J'ai dévoré les 130 pages la gorge nouée par les sentiments maternels si bien exprimés, le décor de Bretagne, les paysages, la mer, les sentiments humains et la vie de cette femme sont si biens écrits, on respire l'iode, on sent le vent sur la peau, on voit les bateaux rentrés au port, tous les sens sont sollicités, et l'on ne peut que penser qu'il y a du vécu là-dedans ou pour le moins un gros travail d'observation.

A cette grotte où nous vivons seuls où personne ne peut entrer, à cette part obscure et inavouable que nous portons en nous.(p113)

J'ai rencontré il y a quelque temps l'auteure qui expliquait qu'elle partait d'un détail, d'un lieu pour construire ses histoires mais moi j'ai le sentiment que cette femme a eu mille vies pour pouvoir nous faire partager tant d'émotions, tant de voyages et moi c'est ce que je demande en premier en littérature. Merci Madame.
Lien : http://mumudanslebocage.word..
Commenter  J’apprécie          383



Ont apprécié cette critique (34)voir plus




{* *}