Les enfants de Noé

Derrière cette histoire d'une famille de survivants à une catastrophe climatique, la question posée par ce roman de science-fiction est celle de l'humanité : que faut-il pour recréer la vie quand on est séparé de tout et de tous ? Quels sont nos vrais besoins ? Au fil des pages, on suit le récit du narrateur, adolescent devenu adulte qui se remémore en s'aidant du carnet de bord de son père, comme un récit d'expédition scientifique. Il s'agit d'abord des besoins matériels et de l'ingéniosité nécessaire à leur satisfaction, puis de la chaleur du foyer, de la lumière, d'activité, de repères temporels, de l'espoir de ne pas être seuls, et petit à petit quelque chose devient de plus en plus important, à travers la lecture : il s'agit de la connaissance, de l'humanité concentrée, du partage, et finalement, ce qui empêche de vaciller, la poésie, la quête de sens. Et c'est là que le roman m'a un peu déçue par sa conclusion, un peu trop judéo-chrétienne en oubliant un peu vite que d'autres voies offrent du sens, la poésie, la philosophie, l'art, la vie en société, etc. Dommage, car c'est un livre bien écrit, où les multiples références littéraires viennent illuminer le récit et la vie intérieure des personnages emmurés, isolés. L'image était suffisamment belle, sans qu'il soit besoin d'insister autant sur la Bible.
Je regrette aussi personnellement la vision un peu "patriarcale" du récit où la mère et la fille restent le sexe faible, moins fortes physiquement, intellectuellement, intuitives plus que réfléchies, en charge des tâches domestiques (nourrir et laver), moins fortes psychologiquement... Ces poncifs alourdissent le propos et ne rejoignent que trop un conservatisme qu'on reproche justement à la morale judéo-chrétienne...