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Critique de Kirzy


Quand s'ouvre le roman, Rika a fui le Japon pour passer la frontière japonaise. La presse titre sur une affaire de détournement de fonds à hauteur de 100 millions de yens ( près de 800.000 euros ) alors qu'elle travaillait dans une banque comme responsable de clientèle auprès de personnages âgées.

Rika est un personnage d'une formidable opacité. Jolie, mal mariée mais épouse modèle, sans enfant, une vie bien banale comme tant d'autres. Mitsuyo Kakuta construit son récit à coup d'analepses pour essayer de comprendre ce qui a pu amener la très réservée et droite Rika à basculer dans l'indignité. Elle focalise l'attention et pourtant, c'est progressivement un petit choeur de femmes ( toutes ont connu Rika ) qui se forme et raconte la condition féminine japonaise et plus largement la société du pays : soumission au mari, emprise des crédits à la consommation, addition à la société de consommation, conformisme social y sont décryptés minutieusement, l'air de rien.

C'est là que le roman se nimbe d'une subtile subversivité avec le récit d'une femme qui s'émancipe en volant des personnages âgées qui lui vouent une confiance quasi filiale. Même si au départ, elle est animée par des motivations superficielles et égoïstes, elle brise une myriade de tabous et contraintes inhérentes à une société japonaise très corsetée et réglementée, comme lorsqu'elle ose inviter son mari dans un restaurant cher, un affront assimilé à une volonté de l'humilier comme s'il n'avait pas les moyens de le faire.

Cette rébellion buissonnière est racontée d'une écriture plutôt lapidaire et froide, ce qui crée une tension, certes légère, mais toujours présente qui fait grandir une sensation de malaise devant cette quête de liberté et d'être soi. le lecteur flotte au dessus des personnages dans une ambiance à la fois ouatée et violente psychologiquement.Ce n'est pas un roman qui vous fait vibrer d'émotion mais réfléchir. Rika ne suscite certes pas d'empathie, elle reste terriblement hermétique, et pourtant, on a l'impression de la comprendre dans sa dérive qui n'en est d'ailleurs pas forcément une. C'est ce qui fait toute la beauté des dernières pages, consacrées non pas à Rika mais à Aki, son amie, magnifiquement éclairée alors qu'elle aussi a chuté aux yeux des conventions japonaises.

Un roman troublant et subtil.
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