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Critique de oiseaulire


Ce thriller de Stéphanie Kalfon offre une plongée efficace et terrifiante dans l'univers du trouble mental : une mère ne reconnait plus sa fille ; ou plutôt est persuadée que sa fille n'est plus sa fille mais un sosie qui la remplace.

Cette maladie existe vraiment : elle s'appelle le syndrome de Capgras, ou "illusion des sosies".

En deux cents page, avec un beau style sensible, l'auteure développe un scénario progressif, convaincant et angoissant : ce à quoi nous sommes le plus attachés, ce que nous appelons notre "humanité", c'est-à-dire nos sentiments les plus profonds envers les êtres chers, dépendent-ils vraiment des propriétés physiques et neuro-anatomiques de notre cerveau ? Autrement dit sommes-nous entièrement à la merci de son bon fonctionnement et de ses lésions éventuelles ?

La réponse est oui, bien sûr.
Et là on touche à la question de la vie, de l'individualité, de la finitude : est-il possible que nous soyons entièrement matière ?
Ça dépend de ce qu'on entend par "matière" ; et on pourrait retourner la question cul par dessus tête et demander si nous ne serions pas plutôt entièrement esprit. Moyennant quoi on arriverait à l'équation suivante : matière ⇐⇒ esprit.

A moins que nous soyons à la fois l'un et l'autre, ou ni l'un ni l'autre (ce qui reviendrait au même).

Mais alors, que sommes-nous ?
Sommes-nous ?
La vie est-elle un songe et qui rêve ?

Je divague un peu, le bouquin m'a tapé sur le système. Preuve qu'il est bon.

En conclusion je reprends un des tout derniers passages du livre, une réflexion de l'héroïne à la perception et aux affects distordus : " On me croit égarée, mais c'est une incompréhension de plus des traces que je sème, des migrants que nous sommes, crevant de vivre, rêvant de trop, écartelés entre ces deux terres que sont la mort et l'enfance, je passe, je passe, je n'ai pas la main cette fois, je passe. Je cherche les liens du pardon, je reviens à la surface de la vie, émergeant depuis des phrases nulles et non avenues. Tout cela à cause de ce penchant, cette aspiration au vrai, au réel, au non apparent, au certain !"

Cette lecture m'a fait penser à l'essai paru en 1985 du neurologue Oliver Sacks "L'Homme qui prenait sa femme pour un chapeau" . En vingt-quatre chapitres, l'auteur y dépeignait les comportements les plus étranges occasionnés par les affections cérébrales.
Ce roman, "Un jour ma fille a disparu dans la nuit de mon cerveau" pourrait être l'illustration, très réussie, de l'un d'eux.



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