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Critique de AugustineBarthelemy


Ma dévotion, c'est la longue confession d'Helen qui, au soir de sa vie, raconte cette étrange relation d'interdépendance qui s'est nouée entre elle et son ami Frank. Helen est fille de diplomate. C'est quand son père devient ambassadeur à Rome, dans les années 50, qu'elle rencontre Franck. Entre eux, l'entente est immédiate : Frank comprend de suite qu'Helen, tout comme lui, déteste sa famille. Un père absent, une mère déçue par la banalité de son physique, elle qui est reconnue pour sa beauté, et deux frères lubriques, qui aiment un peu trop regarder leur soeur quand elle est nue. Pour échapper à un univers fait de mensonges feutrés, Helen se réfugie dans les livres, sa première grande passion. Elle trouve en Frank un pilier et un soutien inattendus.

Dans les rues de Rome, ils grandissent ensemble et projettent, à la fin de leur lycée, de partir vivre à Amsterdam, quitter enfin leur famille au climat délétère. Mais Frank rate son année, il n'est pas diplômé, contrairement à Helen qui a brillamment réussie. Pour la première fois, Helen va se porter au secours de Frank. Elle plaide sa cause auprès de son père, sait trouver les mots pour le convaincre. Ils partent. Pendant dix ans, ils vont vivre dans l'appartement de la mère d'Helen. Elle, faisant enfin des études de lettre, montant une petite édition, écrivant des essais, s'occupant du foyer, sans cesse au travail. Lui, il se laisse vivre et prendre en charge par son amie. Jusqu'à ce qu'il découvre la peinture, et du talent.

À partir de cet instant, Helen vivra dans l'ombre de Frank. Ce dernier flamboie, brûle la vie par les deux bouts, tombe amoureux de la belle Anna, une fille d'industriel qui a une galerie de peinture et qui participe à l'ascension de sa carrière. Helen, pendant ce temps, continue de s'occuper de Frank et de l'entretenir méticuleusement. Il a bien son atelier personnel, pourtant, pour créer, il continue de se réfugier dans l'appartement de son amie. Chacun a besoin de l'autre pour vivre et s'épanouir.

Ils ont bien essayé de vivre séparément. Helen a même épousé un architecte, Günter. Elle est partie s'établir avec lui à Boston, même si elle s'est sentie piégée par ce déménagement soudain. Ensemble, ils ont construit une vie dans une ville neuve, dans un grand appartement moderne, fait de verre et d'acier. Ils ont tenté d'avoir un enfant, en vain. Et pendant ce temps, comme des bouteilles jetées à la mer, Frank lui fait parvenir ses tableaux, inlassablement, maintient pernicieusement un lien que ni l'un ni l'autre ne veut couper.

Helen apprend un jour que Frank a été vu en compagnie d'un enfant de trois ans. Qui est ce mystérieux bébé, surgi de nulle part, et qu'il a même caché à Helen ? Elle s'enfuit, quitte son mari et va s'établir en Normandie avec Frank et son fils. Pour elle qui n'avait jamais pu avoir d'enfant, c'est providentiel. Enfin, une vie de famille rêvée et tant désirée semble à sa portée. Et Helen, une fois de plus, se consacre à Frank et à son fils, fourmi, elle prend soin d'un foyer que la cigale insouciante prend pour acquis. Jusqu'à ce que la jalousie s'invite sous la forme d'une jeune femme qui a l'avantage d'avoir trente ans de moins que la dévouée Helen. Qui laisse éclater une colère aussi soudaine que dévastatrice.

Ma dévotion, c'est une réécriture de l'histoire de Pygmalion et Galatée, c'est le récit d'une femme qui s'est sacrifiée en silence, et avec bonheur, pour rendre la carrière de Frank possible. Helen, c'est la femme laborieuse, la fourmi qui déplace des montagnes, accepte de s'effacer au service d'un autre qu'elle comprend mieux qu'elle ne se comprend elle-même. Une femme qui, par amour, renonce à son amour, jusqu'à atteindre une certaine forme de déraison et de folie.
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