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Critique de Zora-la-Rousse


Un road-trip à travers les États-Unis des années 1950…
Avec son roman Sur la route, Jack Kerouac relate les différents voyages qu'il a pu entreprendre en compagnie de divers comparses, voire en solo. Largement autobiographique, dans une vision réaliste et cependant sublimée, c'est le récit tout en bloc de ces fameuses virées, préparées ou improvisées, qui laisse découvrir une certaine Amérique, en mode auto-stop ou voiture empruntée, pointant là pour l'auteur et ses compagnons de voyage la naissance d'amitiés fraternels ou éphémères, d'histoires d'amour véritables ou d'un soir, mais surtout l'assouvissement d'un grand désir de liberté et découverte.

Sur la route, c'est un mélange étrange du mouvement et du statique, comme deux phases alternatives indissociables. Régulièrement, la nécessité du voyage devient impérieuse et s'impose, parce que « La route, c'est la vie ». Pour Neal surtout, le poète vagabond, les périples sont fondamentaux et à portée curative, dans le sens où ils le protègent d'une dégradation de son état mental. La vie ne l'a pas épargné, loin de là, et c'est cette forme de folie préservatrice qui séduit Jack, le conquiert et le persuade que c'est cet état d'esprit qui va l'aider à transcender son écriture.
Parfois paumés, souvent désargentés, le voyage se voit souvent interrompu et il leur faut régulièrement s'arrêter, trouver le moyen de se nourrir et de repartir, en bus ou en voiture. Ces temps de pause sont propices à la réflexion, à l'introspection mais aussi à l'observation pour Jack. Au fil du roman, ses désirs s'affinent, se précisent. Il s'esquisse alors une intention, une fuite en avant certes, mais vers un but aux contours encore flous.

Sur la route, c'est la célébration de l'amitié et des rencontres. Celle qui lie l'auteur à Neal débute dès le début du livre et se trouve scellée autour d'un idéal, d'un mode de vie commun, initié par l'ami de l'auteur. Déambulations le long des routes et des voies ferrées, longues locomotions en voitures, tout est propice aux échanges, aux rapprochements, aux accrochages parfois, aux incompréhensions aussi.
Tout cela ne peut s'accomplir qu'avec du carburant, évidemment, et leur énergie à eux, ils la puisent dans l'amour qu'ils se portent, la fraternité mais aussi dans l'alcool, la benzédrine et la marijuana... Plus fort encore si possible, une passion commune du jazz les unit, dans de longues soirées d'exaltation dans des bars et des clubs de misère, une musique qui exprime la souffrance mais aussi la communion et l'espoir.

Sur la route reste un roman de l'extrême. La consommation d'alcool et de diverses substances prohibées est omniprésente et sans limite mais elle ne reste que moyen d'atténuer des douleurs personnelles : pour Neal, une enfance perdue et traumatisée, qui le conduit encore adulte au bord de la rupture et de la folie, et dans une recherche perpétuelle du père disparu. Cette douleur est également partagée par Jack qui lui a perdu le sien quelques années auparavant, tout comme son petit frère qu'il imagine comme incarné en Neal, un frère devenu grand.
Les sentiments ou ressentis sont intenses, parfois excessifs, en amour et en amitié, dans le dépassement de soi, dans la douleur (de la faim ou de la soif, de la chaleur ou du froid). le corps est mis à l'épreuve autant que la mécanique automobile, l'esprit aussi avec l'exigence partagée autour de la nécessité de se souvenir de tout, dans le moindre détail, pour réaliser le but ultime : écrire.


Je ne saurai dire au final, encore plusieurs jours après avoir refermé le roman, si je l'ai aimé ou pas. Plus j'y réfléchis, plus cette question devient secondaire. Une chose est sûre, ce fut une expérience, avec ses fulgurances et ses afflictions, une sincère incompréhension qui se mue au fil des pages en une perméabilité (relative malgré tout) au concept de l'enivrement du voyage dans les grands espaces, à l'idée d'expérimenter l'improvisation permanente au quotidien.
J'ai plus certainement retenu la volonté d'observation et d'introspection, l'invitation à suivre comme en direct le flot des pensées de Jack nourri par ses errances, m'incitant à poursuivre sur ma propre route, mais avec une touche d'insouciance plus marquée…
En bémol, une difficulté de lecture est survenue en partie en raisondu format, car si on s'attarde en librairie, deux versions sont en effet disponibles. J'ai pour ma part commencé sur la version la plus connue, avec les pseudonymes de Sal et Dean...mais je ne m'y retrouvai pas. Pour goûter au mieux cette écriture spontanée et saisie sur le vif, inspirée de la vitalité et de l'essence du jazz, j'ai vite basculé sur le rouleau original. Plus de chapitres ! Et ainsi au plus près de l'intention initiale de l'auteur.

Thanks and bye Jack ♪♪♪
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