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Critique de NoureddineTAS


Issu d'un séminaire organisé en avril 2014 par le Forum de solidarité euro-méditerranéenne (FORSEM), en partenariat avec l'école nationale supérieure et l'institut d'études politiques de Lyon, cet ouvrage comporte sept contributions de sept auteurs différents, ainsi qu'une dédicace à la mémoire de Gilbert Meynier, une préface et une conclusion, trois annexes écrites par Tahar Khalfoune. Ce dernier rapporte l'observation faite par Gilbert Meynier, qui a consacré toute sa vie à l'Histoire de l'Algérie, que s'il y a bien « plusieurs couleurs à l'arc-en-ciel, il n'y a qu'un seul ciel ».

Le juriste Tahar Khalfoune analyse dans sa communication “L'approche organique à une conception citoyenne de la nation”. Il commence d'abord par rappeler les propos de septembre 2021 du Président Emmanuel Macron : « La construction de l'Algérie comme nation est un phénomène à regarder. Est-ce qu'il y avait une nation algérienne avant la colonisation française ? Ça, c'est la question… ». L'auteur explique ensuite que la nation est un environnement de concepts proches, mais distincts et que la nation possède notamment deux conceptions en compétition, une française et une allemande. À propos de l'Algérie, le juriste écrit : « Depuis son indépendance, les dirigeants n'ont ménagé aucun effort pour que le pays fasse nation, mais suivant un modèle radical, à la seule norme “sacro-culturaliste arabo-islamique”, c'est-à-dire que l'assimilation opère ici par effacement de l'altérité dans cet ensemble dominant. »

La seconde communication présentée par l'anthropologue Aomar Boum, Professeur à l'université d'Arizona, traduite de l'anglais par Kenza Sefrioui, porte sur “La question juive dans le Maroc contemporain : mémoire, réconciliation et citoyenneté”. Elle traite du rapport ambivalent aux minorités par les politiques, de la littérature comme mémoire des minorités et des initiatives pour rendre visible le judaïsme marocain. Dans son épilogue l'anthropologue souligne que « malgré l'importance accordée aux juifs comme composantes de la nation marocaine, comme le stipule la Constitution de 2011, peu de mesures officielles ont été prises pour que cette connaissance des droits des minorités et de la citoyenneté soit inscrite dans l'enseignement public ».

Intitulée “Algérie/Maroc, la nouvelle politique berbère : apparences et réalités”, la troisième communication est présentée par le spécialiste de linguistique berbère, Salem Chaker. Ce dernier commence par reconnaître que “des évolutions considérables, et à bien des égards étonnantes, se sont produites en Algérie et au Maroc dans la gestion de la « question berbère »”. Mais il termine par le constat : “la nouvelle politique berbère, convergence stratégique Algérie/Maroc : la neutralisation par intégration.”
La quatrième communication des professeurs Antonio M. Morone et Chiara Pagano a pour titre : “Les berbères du jebel Nefoussa dans la Libye d'après Khadafi : une perspective historique”. Les auteurs rappellent d'abord que durant quatre décennies, la durée du règne du Raïs, la minorité berbère en Libye a été systématiquement écartée de la politique, de l'histoire et de la mémoire de la “Grande Jamahirya”. Ils abordent ensuite l'histoire du “Jebel” et sa révolte, la transition libyenne et les instances actuelles des Berbères.

Clément Steuer, chercheur en sciences politiques et en sociologie, étudie dans la cinqième communication le cas de “L'Égypte : le rôle politique des minorités”. « Les minorités religieuses, entre antagonisation et injonction à l'effacement », « Les minorités ethnolinguistiques, des minorités à la marge du débat public », tels sont notamment deux titres abordés dans cette contribution.

Chercheur en sciences politiques, Akram Kachee est l'auteur de la sixième communication qui a pour titre : “Y a-t-il des minorités en Syrie ? Un bref paysage des communautés syriennes”. Dès le début l'auteur rappelle que : « On a souvent évoqué la Syrie comme une mosaïque de diversité ethnique et religieuse ». Les islams, les alaouites, les druzes, les ismaéliens, les chrétiens et les yézidis sont ensuite passés en revue. À propos de la diversité linguistique, le chercheur note : « Si la langue arabe est la langue officielle et la langue de communication de tous, elle n'est cependant pas la langue maternelle de tous les Syriens ».

L'historien Hamit Bozarslan aborde l'histoire des Kurdes dans la septième et dernière communication : “Irak, Iran, Syrie, Turquie : Les dynamiques de la violence au Kurdistan – XIXème-XXème siècles”. Il débute par les premiers soulèvements de 1806-1808 et il termine par l'embrasement des décennies 1970-1990. Parallèlement au maquis, la violence, écrit-il, « prit la forme d'affrontements quotidiens avec l'armée ou la police, pour se définir serhildan (soulèvement), partageant de nombreux traits avec la première Intifada palestinienne dont elle s'inspirait ».

Dans la conclusion, Tahar Khalfoune pense qu'“il est temps de sortir des approches jacobines et normatives dominantes sur l'état-nation et qui voient dans les différences une infériorité, dans les minorités nationales une menace à la cohésion sociale et dans la présence d'éléments culturels profanes ou sécularisés une souillure dans les cultures « sacralisées »”.

Très intéressant à plus d'un titre, facile à lire, ce livre comporte une riche bibliographie classée par thèmes comme “Réflexions sur la nation”, “Les Juifs du Maroc” et “Les Berbères”. le lecteur trouvera non seulement un début de réponse à ses nombreux questionnements, mais aussi de quoi assouvir sa curiosité et approfondir sa réflexion.

Idir Tas
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