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Critique de Biblioroz


Dans ce comté du Kentucky, Marietta s'interroge sur son avenir et ne pense pas pouvoir s'en sortir. Avec sa mère employée de maison, un père inconnu et l'unique perspective de tomber enceinte et se marier très jeune avec un planteur de tabac, ses chances sont minces. Après quelques économies tirées d'un travail à l'hôpital, elle se dégote une vieille coccinelle et met le cap vers l'Ouest américain, enfin si la mécanique durement éprouvée de ce vieux véhicule le lui permet. Et pour appuyer son nouveau départ, elle s'arme également d'un nouveau prénom choisi sur la route : Taylor.

Comme j'ai aimé, avec ce côté débordant de simplicité, accompagner Taylor à la recherche de son avenir ! Sa force, puisée sans aucun doute dans toutes les bonnes paroles d'encouragements, d'amour et de fierté prodiguées par sa mère donne un élan positif communicatif que l'on saisit avec délice pour partir avec elle sur les routes de son futur.
On fera alors une petite halte dans les interminables plaines d'Oklahoma, terres obligées des Cherokees, où l'horizon semble infini, la vue se perdant désespérément dans la monotonie toute plate de ses paysages. Pas d'arbre en vue mais un arbre de transmission de la coccinelle qui lâche. La faim et la fatigue font entrer Taylor dans un bar crasseux d'où une femme émergera et déposera dans sa voiture fraîchement réparée un enfant « Prenez-le, c'est tout. »
Un peu plus tard, deux pneus en fin de course arrêteront le périple de Taylor et de sa petite protégée dans la ville de Tucson en Arizona.

Comment ne pas s'attendrir devant cette toute petite fille indienne déjà meurtrie par la cruauté humaine ? Sa façon de s'agripper à quelqu'un, à quelque chose lui vaudra instantanément le prénom provisoire de Turtle. J'ai été très sensible à la manière de Taylor de laisser Turtle appréhender sa nouvelle vie, sans brusquerie, sans stimulation. Simplement lui laisser le temps sans jamais remettre en question ses capacités d'éveil.
Ce livre, c'est une multitude de choses simples qui composent la vie américaine des années 80. Cette vie où des jeunes femmes, des jeunes mères tentent avec quelques petits boulots de rester juste quelques étages au-dessus des paumés qui hantent les villes. C'est aussi l'époque de l'immigration guatémaltèque que l'on retrouvera ici avec une solidarité qui fait chaud au coeur.
Il nous offre une photographie bien dépaysante de cet État d'Arizona avec sa sécheresse dont les cigales se régalent en jetant leurs stridulations incessantes qui finissent par exaspérer Taylor. On y sentira l'odeur de la pluie lorsqu'elle arrive enfin sur ce sol grillé. Et nos yeux s'écarquilleront devant le jardin improbable de Mattie où s'élèvent, au milieu de vieux pneus, les haricots violets et de belles tomates en ce début janvier !

Avec un naturel tonique, des comparaisons humoristiques pétillantes que l'on savoure, Taylor nous narre les petits riens de sa nouvelle vie, ses rencontres, ses découvertes, belles ou tristes, avec bien souvent une délicate dérision. Entre sa phobie des pneus qui peuvent potentiellement éclater et son refus de maternité, elle trouvera dans l'un et l'autre de quoi asseoir son avenir. C'est une lecture fraîche et attendrissante, pleine de fantaisie, mais qui reste bien ancrée dans ce monde pas franchement rose qui entoure nos personnages. J'ai d'ailleurs quitté tout ce petit monde à regret parce que, parfois, tendresse, humanité et bonté font oublier ou du moins mieux supporter les côtés sombres de la vie.
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