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Critique de Marie987654321


Poétesse et journaliste sud africaine de langue afrikaans, engagée dans la lutte contre l'apartheid, Antjie Krog a suivi en tant que journaliste la commission "Vérité et réconciliation" et nous livre un témoignage rare et unique : rappel des témoignages innombrables des victimes et des bourreaux, témoignage de son ressenti personnel douloureux face à ces témoignages en tant que blanche Afrikaner issue d'une famille nationaliste, réflexion sur les difficultés, les limites et les succès de la commission.. et témoignage d'une femme poète blessée et ressentant la douleur des mots, la vérité des êtres et la douleur d'être soi.

Vraiment un texte unique!

Au delà de l'édification des témoignages des victimes et des bourreaux sur les horreurs subies ou commises, souvent insoutenables (mais pour lesquelles Antjie Krog n'use pas de voyeurisme, préférant transmettre la douleur plutôt que l'effroi), le récit nous montre l'originalité profonde de cette commission dans l'histoire des horreurs humaines et de la manière de s'en relever et de continuer à vivre.

La complexité de la situation de la nouvelle Afrique du sud apparait : faire vivre ensemble les bourreaux et les victimes, poser la question de ceux qui ont bénéficier de la situation et de la "protection" des bourreaux de l'armée, de la police ou des milices sans avoir eux-mêmes agit. Peuvent-ils dire "je ne savais pas que tout cela existait"?
Comme le font les politiques au pouvoir sous l'apartheid, soutenant, sans scrupule et sans que l'on parvienne à les croire, que les horreurs étaient le fait d'individus isolés qui outrepassaient les consignes et qu'eux_mêmes n'avaient jamais voulu cela.

C'est peut être ce qu'apporte la commission "maintenant je sais ce qu'a coûté ma douceur de vivre, le prix que d'autres ont payé dans leur chair, les actes dont d'autres se sont rendus coupables".

La commission juge aussi les crimes commis par les militants noirs de l'ANC ou de l'Inkhata contre les blancs ou contre les noirs accusés de trahison : la justesse de la lutte autorisait -elle l'usage de tous les moyens ? ou bien à un certain moment quelque chose a-t'il mal tourné? selon la formule utilisée par Monseigneur Tutu pour interpeller Winnie Mandela, mise en cause devant la commission pour plusieurs meurtres pour lesquels elle refuse de reconnaitre une responsabilité.
Les travaux de la commission sont dominés par l'aura de Monseigneur Tutu qui la préside et pour lequel Antjie Krog exprime une véritable vénération. Selon la phrase d'un membre de la commission qu'elle reproduit " Tutu a une façon à lui de rendre les choses possibles, de transcender un problème particulier, de l'élever à un niveau tel que nous nous retrouvons tous"

Voici la conclusion :

> "Sous une arche d'air violente, le bateau en route vers le continent me secoue ainsi que les commissaires. Je suis prise d'une indescriptible tendresse envers cette Commission. avec toutes ses erreurs, son arrogance, son racisme, son côté moralisateur, son incompétence, les mensonges, son incapacité en deux ans à mettre en place une politique d'indemnisation provisoire, sa frime - avec tout cela-, elle s'est montrée courageuse, naïvement courageuse face aux vents de fourberie, de rancoeur et de haine. Face à la marée écrasante, sous le poids d'un passé brutal et de nouvelles politiques usurpatrices, la commission a maintenu en vie l'idée d'un humanisme commun. Elle a ciselé dans la douleur un chemin au-delà du racisme et donné du champ à toutes nos voix. Malgré tous ses échecs, elle a cependant allumé une lueur d'espoir qui me rend fière d'être ici.
Lien : http://maryclaudef.free.fr/d..
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