"Il y a tellement de choses qu'on ne sait pas et qu'on n'a plus le droit d'ignorer."
"Avigaël anesthésiait son angoisse avec sa drogue préférée, l'espoir."
- Mes enfants, vous allez souffrir et vous ne comprendrez pas pourquoi. Vous allez changer et vous ne saurez pas jusqu'où ça ira. Vous serez seuls et je ne serai pas là. Mais il y a trois choses auxquelles vous allez obéir. Obéir sans rien y comprendre. Parce que je suis votre mère et que je vous l'ordonne.
Elle reprend son souffle.
- Ne buvez jamais de sang.
"Le temps semble s'arrêter un instant alors que je les observe. Je les aime tellement? Chaque seconde passé ensemble vaut toutes les batailles. Nous sommes ensemble et rien d'autre n'a d'importance."
"_Je n'aime pas cette situation, mais je m'adapte. Et le jour où mon humeur sera "stable" (je grimace), c'est que j'aurai sombré.
Je soupire.
_C'est ce qu'il se passe quand on arrête de bouger dans des eaux déchaînées, j'ajoute. On coule, n'est-ce pas ?
Il reste la à m'observer, sans rien dire."
"Nous sommes ensemble et nous sommes libres. C'est tout ce qui compte. Qu'allons-nous devenir ? Pourquoi avons-nous dû vivre tout ça ? Je ne veux pas de réponses. Je supporterai les questions tant qu'elles ne nous sépareront pas."
Je reprends ma route, à l’affut du moindre bruit qui signalerait sa présence. Un éclair déchire le ciel et le silence fait place au grondement du tonnerre. Une pluie diluvienne s’abat dans les bois. La terre se transforme en boue. Des trombes d’eau plaquent mes cheveux et coulent sur mon visage. La pluie claque contre les feuilles sous la force du vent. Je commence à les distinguer nettement. Des pas lourd et précipités, derrière moi. Une odeur de chair pourrie, d’arbre mouillé et de boue. C’est bien lui, le garde-forestier. Il porte une salopette bleue ciel barbouillée de sang. Sa manche droite retroussée révèle un bras lacéré de morsures. Il lui manque un doigt. Le bas de son pantalon est déchiré. Il reste braqué sur un point derrière moi. De nouveau, il me toise. Jalousement. Rien qu’à le regarder, je comprends qu’il me veut pour lui tout seul. Car les autres pas que j’entends derrière moi ne peuvent être que ceux d’un prédateur concurrent. Le garde-forestier fonce sur moi. Je suis coincée. Une échappatoire impossible se présente. D’instinct, je ressens que c’est la bonne. Je prends mon élan et m’agrippe à la branche d’un épicéa. Je grimpe sans m’arrêter jusqu’à me retrouver suspendue à trois mètres au-dessus du sol. Le garde-forestier est le premier à essayer...
Son ongle pointu passe en dessous de mon menton. Elle retire ses ongles de sous ma gorge et dans le même mouvement, la Primitive tourne la tête vers moi.
- On… on… on… On… se… dirige… vers… Elle roule des yeux et s’en remet à ce qu’elle voit par la fenêtre.
- Est-ce qu’ « on…on…on… » en a pour longtemps à traverser ce foutu cimetière de damnés ? J’en peux plus là. Les yeux au bord des orbites, je fais non de la tête. Le camion quitte le sentier qui nous a fait circuler au milieu de parcelles de tombes pendant de longues minutes. Il s’avance jusqu’au mausolée des Bouchard et s’arrête en plein devant.
"_La Terre tourne autour du Soleil et la Lune autour de la Terre...C'est marrant, les gens, c'est comme les astres. Toujours un qui tourne autour de l'autre."
"_Sergent, ce n'est pas le genre d'information qu'on donne à des gosses.
Je les entends comme si j'étais avec eux !
_Ils méritent qu'on leur foute la trouille.
_Peut-être mais pas avec la vérité !"