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Critique de Amnezik666


Je tiens à remercier les éditions Super 8 et la plateforme NetGalley pour la confiance qu'ils m'ont témoignée en acceptant ma sollicitation pour ce titre.

Un roman (?) qui a bien failli ne jamais voir le jour comme nous l'explique Kurt Vonnegut dans son prologue :

Et voilà que moi, à l'hiver 1996, je me trouvais être le créateur d'un roman qui ne tenait pas debout, qui n'allait nulle part et qui, pour commencer, n'avait jamais demandé à être écrit. Merde ! J'avais, si vous voulez, passé pas loin d'une décennie sur ce poisson ingrat. Et il n'était même pas bon à appâter les requins.
(…)
Mon gros poisson, qui puait pas mal, était intitulé Tremblement de temps. Baptisons-le Tremblement de temps I. Et baptisons celui-ci, ragoût concocté à partir des meilleurs morceaux du précédent et mélangé à des réflexions et expériences des sept derniers mois environ, Tremblement de temps II.

Bien que le roman ait été publié en 1997 et que l'auteur jouisse d'une certaine notoriété, il faudra attendre 2018 pour qu'une version française soit publiée à l'initiative de Super 8. L'occasion pour les lecteurs français de découvrir un inédit édité à titre posthume (Kurt Vonnegut est mort en 2007, à l'âge de 84 ans).

Je ne sais pas si ce Tremblement de Temps est représentatif du travail de Kurt Vonnegut, mais c'est, de prime abord en tout cas, totalement déroutant comme lecture. le pitch proposé n'est que très vaguement évoqué et sert surtout à l'auteur de prétexte pour nous parler de lui à travers diverses anecdotes le concernant lui ou ses proches et autres réflexions sur des sujets divers et variés.

Son alter ego fictionnel (avec qui il échange beaucoup), Kilgore Trout, écrivain de SF qui a la particularité de jeter aux ordures ses nouvelles sans même chercher à les faire publier, intervient souvent pour nous faire part, lui aussi de ses réflexions et son vécu (?).

J'avoue qu'au début de ma lecture je me suis demandé dans quel bourbier j'avais mis les pattes et quel pouvait bien être l'intérêt de la chose que j'étais en train de lire. La réponse s'est imposée d'elle-même après quelques chapitres ; tout l'intérêt de ce bouquin pour le moins atypique réside dans la plume de Kurt Vonnegut.

Force est de reconnaître que l'auteur est un conteur hors pair, on boit littéralement ses phrases, c'est un véritable régal pour les yeux, le coeur et les neurones (mon athéisme viscéral m'interdit d'y ajouter l'âme… mais grande est la tentation de le faire). J'en profite d'ailleurs pour saluer le travail de la traductrice Aude Pasquier.

Kurt Vonnegut a autant de gouaille que de talent, la langue de bois et le politiquement correct ne sont définitivement pas sa tasse de thé, il dit ce qu'il a à nous dire sans y aller par quatre chemins, pimentant même son propos d'un humour aussi ravageur que corrosif.

Morceau choisi à propos de l'Église :

« Quand ils ont découvert que j'étais divorcé, ai-je dit, ils m'ont prescrit toutes sortes de pénitences qu'il fallait que j'accomplisse avant de redevenir assez pur pour pouvoir me marier chez eux.
— Eh bien, voilà, a dit Trout. Imaginez les pinailleries qu'il aurait fallu que vous surmontiez si vous aviez été un ancien taulard. Et puis, si ce pauvre enculé qui vous a écrit a vraiment trouvé une Église qui l'a accepté, il pourrait très bien être de retour en prison à l'heure actuelle.
— Pourquoi ? ai-je demandé. Pour avoir piqué dans le tronc des pauvres ?
— Non, a répondu Trout. Pour avoir plu au Christ en abattant un médecin qui se rendait à son boulot dans une usine à avortement. »

Si l'auteur peut se targuer d'avoir eu une vie bien remplie ponctuée de nombreuses rencontres, mais aussi de deuils ; les interventions de Kilgore Trout quant à elles apportent un brin de folie à l'ensemble, à travers notamment des rencontres avec des personnages hauts en couleur et ses nouvelles aux histoires pour le moins ubuesques.

Ce bouquin n'est à nul autre pareil, un véritable fourre-tout sans queue, ni tête, mais qui se lit malgré tout avec beaucoup de plaisir (et j'en ai été le premier surpris). Une lecture quasi expérimentale qui vaut son pesant de cacahuètes. A réserver toutefois aux amoureux des mots qui ont un peu de temps à perdre…

Je ne peux pas dire, en refermant ce bouquin, que j'ai découvert l'univers littéraire de Kurt Vonnegut, par contre j'ai appris beaucoup de choses sur Kurt, non seulement l'auteur, mais aussi l'homme qu'il était. Une belle rencontre par écrits interposés qui m'a donné envie de découvrir ses « vrais » romans.

Je laisse le mot de la fin à Kurt Vonnegut :

Écoutez : nous sommes sur terre pour glandouiller. Ne laissez personne prétendre autre chose !
Lien : https://amnezik666.wordpress..
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