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Critique de panurge


LA MACHINE

Les locomotives à vapeur ont bercé de leur souffle mon enfance. J'habitais à St Ouen, à la lisière de la Porte de Clignancourt, juste à la sortie de Paris. La rue des Poissonniers, appelée ainsi car empruntée par les intermédiaires qui convoyaient le poisson pêché à Boulogne jusqu'aux Halles, le ventre de la Ville, se trouvait bordée par l'ensemble des voies ferrées nées Gare du Nord.Cela circulait jour et nuit, dans une odeur de charbon brûlé, odeur qui évoque le cuir carbonisé, crachait jusqu'au ciel des panaches en noir ou blanc emperlés de suie, hurlait de fureur suraiguë, et filait à la vitesse d'une flèche, la gueule rouge-volcan mâchant son combustible d'un appétit implacablement féroce. Les nuits de Novembre traversées de ces éclairs monstrueusement magnifiques créaient le spectacle le plus effrayant et le plus fascinant qui soit. J'éteignais la lumière de la cuisine et j'attendais la Tache Sanglante. Cette passion revit dans des livres de Vie du Rail dédiées notamment aux Chapelon, du nom de l'ingénieur mécanicien français (1892-1978) de génie qui les imagina, les conçut, les fît naitre. Ces 231(deux roues avant, quatre grosses roues centrales, une roue arrière) forment la cavalerie lourde de la SNCF de l'avant deuxième guerre à leur retrait du service. Les forges de Vulcain leur ayant donné vie, L Equipe les conduisaient en Seigneurs du Rail. Ces hommes noircis jusqu'à l'os, les poumons chauffés à mort par la vitesse, la chaleur, brulés par le froid cinglant, trimaient très durement pour que ce train marche quelles que soient les conditions climatiques, la qualité incertaine des boulets jetés d'une impitoyable pelletée dans le fourneau les mâchant tel Baal lors des sacrifices humains, les aléas de la course. Les photos en noir et blanc de la Machine, la corps ouvragé de tuyaux la parcourant telles d'énormes cicatrices, saisie au repos, au départ, lancée, des gueules des gars sont simples, précises, splendides. Il y a de la tenue, du savoir-faire, de la noblesse là-dedans...Un Univers désormais disparu mais dont les gestes, attitudes et mouvement fixés restent magnifiques.
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