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Critique de Levant


Artemisia ! Une femme qui a voulu exister au moyen-âge quand tout aurait dû la réduire au sort de ses semblables. Quoi de plus extravagant à cette époque que de voir une femme briguer la renommée de ses congénères masculins ?
Cet ouvrage n'est pas une biographie. Ce n'est pas l'histoire d'une vie agencée dans une chronologie. C'est le récit d'un combat de toute une vie. Celui d'une femme artiste peintre qui se bat pour la reconnaissance de son art. Dans le XVIIème siècle italien, ce n'est pas un anachronisme, c'est une incongruité temporelle que tout veut écraser.
Le monde masculin d'abord, « à une époque où les filles appartiennent à leur père ». Un père ambivalent, lui-même artiste reconnu, qui veut trouver son prolongement dans sa descendance et craint en même temps de voir sa propre notoriété distancée. Ce monde masculin qui seul a pignon sur rue, règne sans partage sur la vie policée des citées De La Renaissance, dans tous les domaines y compris artistique.
Le monde chrétien ensuite avec sa dictature exercée sur tous les ressorts de la pensée, de l'expression. « Renoncez à la peinture et ne cherchez pas à connaître une autre science que celle du salut », lui clame son confesseur.
Une destinée cruelle enfin avec ce viol qu'elle subit et dont pourtant les us de l'époque la rendent coupable. « Tu aurais dû m'avouer ton crime le soir même » lui reproche son père. Une destinée cruelle aussi qui lui enlève trois enfants en bas âge et empêtre sa vie amoureuse dans le dilemme perpétuel : la soumission ou la quête de la gloire.
C'est par ses oeuvres qu'Alexandra Lapierre découvre Artemisia Gentileschi. C'est en apprenant son histoire qu'elle décide de se lancer dans un exercice que tous lui déconseillent. C'est à la connaissance de la personne qu'elle sera conquise. On le sera aussi à la lecture de cet ouvrage.
Qui mieux qu'une femme pour évoquer le combat, traduire la sensibilité et la sensualité d'une autre femme, à la fois artiste talentueuse, épouse obligée, mère aimante et amante voluptueuse.
Au-delà de la qualité propre d'un ouvrage qui trouve ses élans romanesques, j'ai été confondu par l'énormité du travail de recherche et d'étude accompli pour aboutir à la publication d'un tel ouvrage. Cela transparaît de la première à la dernière page. le perfectionnisme, dont on se complaît à gratifier les femmes dans des comparaisons hâtives sans originalité, atteint chez Alexandra Lapierre des sommets. Force est de reconnaître, par qui veut formaliser son objectivité, le niveau de précision atteint dans les recherches historique, technique, artistique, sociologique et linguistique.
Mais plus que tout, au-delà de la conscience professionnelle de la biographe, il y a cette capacité, au travers d'une écriture florissante mais sans fioriture, à faire vivre une femme sensible, avec ses joies quelques fois, ses peines plus souvent, ses doutes, sa complexité, mais toujours l'opiniâtreté chevillée au corps.
Alexandra Lapierre nous dresse la fresque d'une femme dans son époque, avec ses ombres et ses lumières. Son ouvrage est magnifique. Comme le tableau d'un maître De La Renaissance italienne.
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